[Dossier] Le rail-route prépare son rebond

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En 2023, la part du fret n'a vraisemblablement pas dépassé les 10 %. Les opérateurs de transport combiné ont donc dû batailler ferme pour faire revenir leurs clients. Avec succès, puisque la proportion de retour équivalait à environ 90 % de l’activité précédente en fin d’année 2023.

Crédit photo Bils-Deroo
Du 29 juillet au 2 août nous vous proposons un dossier spécial rail-route. Après avoir connu une « annus horribilis » en 2023, le transport combiné rail-route se remet en ordre de bataille pour, enfin, prendre toute sa place dans la décarbonation des transports. Son objectif de triplement du trafic devra, cependant, attendre quelques années de plus avant d’être attein

C’est un véritable coup d’arrêt qu’a subi le transport combiné rail-route en 2023. À moins 15,9 % de tonnes/km transportées, la baisse est spectaculaire et ramène le secteur à trois années en arrière selon les données de l’Observatoire du transport combiné. La faute en incombe principalement aux mouvements sociaux liés à la réforme des retraites. « Sans cela, nous aurions pu miser sur une nouvelle croissance du secteur, même si le dernier trimestre était moins bien orienté du fait du ralentissement économique », se désole Ivan Stempezynski, président du Groupement national des transports combinés (GNTC).

Report modal inversé

Classé incontestablement comme annus horribilis, l’exercice passé a donc vu s’opérer un report modal massif inversé durant le premier semestre 2023. Il en a découlé une érosion de la part du marché du fret ferroviaire qui, vraisemblablement et en l’absence de statistiques immédiatement disponibles, n’a pas dépassé les 10 %. Les opérateurs de transport combiné ont donc dû batailler ferme pour faire revenir leurs clients. Avec succès, puisque la proportion de retour équivalait à environ 90 % de l’activité précédente en fin d’année 2023. Mais le GNTC, ainsi que l’ensemble de la filière du fret ferroviaire, restent fermes sur leur position de réclamer des comptes à SNCF Réseau. Au-delà d’une compensation financière qui ne suffira pas à effacer les pertes subies par la profession, ils réclament la mise en œuvre d’un plan de continuité de service qui permettrait de garantir, a minima, la circulation des trains combinés rail-route en cas de mouvements sociaux. Cela éviterait ainsi que cette tâche incombe aux seuls opérateurs logistiques, comme cela a été le cas l’année passée.

Une mobilisation payante

Le combiné rail-route est donc pour l’heure condamné à rassembler l’ensemble de ses forces pour retrouver la dynamique qui était la sienne avant les grèves (croissance de 9,4 % en tonnes/km en 2022). Mais un nouveau phénomène est apparu après l’adoption par le Parlement européen le 12 mars 2024 de la directive Poids et dimensions. Le déploiement possible des mégacamions de 60 tonnes et la généralisation de tous les transports transfrontaliers à 44 tonnes pourraient, en effet, avoir un impact significatif sur la compétitivité du rail-route. « Au-delà d’être un coup porté au report modal, les maxi-trucks entraîneraient nécessairement une évolution à la baisse des parts de marché routières françaises compte tenu qu’ils ne feront que traverser la France. La massification dont il est question de par ce texte existe déjà : c’est le combiné rail-route. Aussi, et compte tenu des exigences liées au Green Deal, arrêtons les rétropédalages en favorisant le combiné rail-route pour les longues distances et le transport routier pour les dessertes courtes. Rappelons ici que le transport combiné fonctionne principalement grâce aux transporteurs routiers », martèle Ivan Stempezynski. Les craintes de la filière du combiné ont été entendues puisque le nouveau ministre des Transports, Patrice Vergriete, a fait savoir par un tweet que « la France redit son refus d’une libéralisation de la circulaire internationale des camions de 44 tonnes et des mega-trucks. Aujourd’hui, la priorité est le report modal, en particulier vers le ferroviaire ».

Signaux positifs

Tous ces contretemps ne devraient pas, toutefois, empêcher le combiné rail-route de poursuivre sa marche en avant. Car une multitude de signaux positifs sont en vue pour 2024 et au-delà. Le premier est lié aux chargeurs qui souhaitent s’engager dans une démarche de responsabilité sociétale et environnementale (RSE). Les opérateurs de transport logistique reçoivent de plus en plus de demandes de la part de chargeurs qui souhaitent faire évoluer leurs plans de transport vers des modes moins carbonés. Le second réside dans la création de nouveaux services qui, parfois, adoptent le temps long du ferroviaire, pour aboutir. Ce sera notamment le cas pour la nouvelle liaison Cherbourg-Mouguerre (près de Bayonne) de Brittany Ferries qui verra finalement le jour en 2025. Entre-temps, la ligne de la Maurienne aura été enfin rouverte après une interruption de plus de seize mois. Les échanges ferroviaires entre la France et l’Italie vont pouvoir à nouveau être développés, en attendant le changement de dimension que devrait apporter la future mise en service du Lyon-Turin.

Les promesses d’Ulysse Fret

La troisième nouvelle positive tient à l’avancement du projet Ulysse Fret. Les quatre milliards d’euros engagés sur la période 2024-2032 vont, en effet, permettre d’accompagner le développement du fret ferroviaire. Sur ce montant, environ un milliard d’euros pourrait avoir un impact très significatif sur les capacités du combiné rail-route à atteindre ses objectifs de triplement de son activité à l’horizon 2030, un objectif à présent reporté de quelques années.

Le montant le plus important concerne les plateformes multimodales. Elles pourraient se voir octroyer une enveloppe de 600 M€ environ. Car la saturation de ces installations guette en de nombreux points du territoire. Dévoilé à la fin du premier semestre 2024, le schéma directeur devrait apporter une réponse quant à la priorisation des actions à mener autour de la rénovation des installations existantes et de la création de nouvelles. Au nombre de 10 à 12, ces nouveaux chantiers de transport combiné pourraient notamment éclore en Île-de-France, Hauts-de-France et Grand Ouest. Un autre volet très significatif des investissements dont l’État prendra également en charge la moitié concernera la mise au gabarit P400 (remorques de 4 m de hauteur) de nouveaux axes de fret porteurs de développement. La somme qui leur sera consacrée devrait être de l’ordre de 500 M€, les principales opérations devant être réalisées concernant les tunnels vosgiens et l’axe Atlantique. Des travaux seront, parallèlement, menés pour favoriser le développement des trains longs (jusqu’à 850 m de longueur). Enfin, la poursuite de la régénération du réseau associée à sa modernisation devrait permettre d’aller chercher de la capacité supplémentaire.

En attendant, et preuve que cette opération de grande envergure a été parfaitement préparée, le transfert à d’autres entreprises ferroviaires de la traction de vingt-trois flux du combiné rail-route dans le cadre de la discontinuité de Fret SNCF, se déroule sans accrocs. Cela démontre la capacité du rail-route à s’adapter à un environnement changeant sous réserve que les règles du jeu n’évoluent pas en cours de route.

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