Lorsqu’il a succédé à Aline Mesples à la tribune du congrès de l’OTRE, Jean-Baptiste Djebbari n’a pas manqué d’ironiser. Le jeune secrétaire d’État aux Transports venait de subir un véritable feu nourri de piques de la part de la présidente de l’OTRE. « Il faut avoir le moral bien accroché pour passer derrière vous », a-t-il lancé à la dirigeante patronale. Celle-ci venait de lui dresser l’inventaire des mesures qui alimentent la colère de son organisation, ses adhérents, et au-delà, de la profession du transport routier de marchandises. « Nous ne pouvons que déplorer que votre gouvernement soit quasiment sourd à nos propositions, nos contributions, nos alertes, nos mises en garde ; pire, aux ambitions que nous portons pour notre profession. » De la place des corps intermédiaires dans le pays, de leur discrédit auprès de l’opinion publique, il a été beaucoup question au cours des échanges qui ont meublé le congrès. Dans son discours de clôture, Aline Mesples n’a pas manqué de faire le constat de « la mise sous tutelle [par l’État, Ndlr] des partenaires sociaux […]. Le gouvernement a considérablement accru son emprise sur le dialogue social ». Il ne joue pas le jeu du consensus avec les corps intermédiaires, notamment ceux du TRM, selon la dirigeante. Laquelle déplore que le gouvernement n’ait pas pris en compte sa proposition de faire contribuer le chargeur (Eco-Transport) en fonction de la volumétrie CO2 du transport qu’il a commandé. Jean-Baptiste Djebbari lui a répondu que la proposition faite récemment par l’ensemble des OP du TRM – la répercussion en pied de facture, sur le chargeur, des deux centimes de TICPE rétrocédés – avait été inscrite dans la loi (en fait, par amendement) de manière à ce qu’elle soit neutre pour les transporteurs routiers. « L’intégralité de ce financement sera allouée à l’AFITF (Agence de financement des infrastructures), nous l’avons inscrit dans la loi », a assuré le secrétaire d’État. Lequel a ajouté que les deux propositions qui lui ont été soumises, pour le paiement du taux réduit de TICPE à la pompe par l’établissement ou d’une carte professionnelle ou du raccourcissement des délais de remboursement, étaient à l’étude. « J’en discute avec mon collègue Gérald Darmanin [ministre des Comptes publics, Ndlr]. Nous menons une mission de manière à aboutir à l’une ou l’autre de ces propositions en vue de la loi de finances 2021 », a déclaré Jean-Baptiste Djebbari tout en précisant que « l’idée était que le taux réduit à la pompe soit conditionné à l’usage de carburant propre ».
Aline Mesples a continué de dérouler l’inventaire des mesures gouvernementales qui alimentent la colère des entreprises de TRM : suppression de la fiscalité sur le GNR et de la DFS (déduction forfaitaire spécifique), malus sur les contrats courts, fiscalisation des entrepôts logistiques, autant de mesures « sous-tendues par une logique comptable et budgétaire. La profession en a plus qu’assez de devoir concentrer ses efforts et son énergie à combattre des mesures qui ne visent qu’à la détruire ». L’ennemi de l’intérieur ? Le secrétaire d’État a indiqué à la salle que Muriel Pénicaud, la ministre du Travail, reviendrait vers les organisations patronales sur ces sujets. Il s’est engagé, en outre, sur le maintien de la participation de l’État au financement du CFA pour les trois prochaines années. Le secrétaire d’État aux Transports a saisi au bond la proposition qui lui était adressée, par l’OTRE, de mettre en œuvre un contrat de transition écologique. « Nous y sommes favorables. Nous devons ouvrir rapidement cette discussion avec l’État et l’ensemble des membres de la filière. Je m’y engage ici devant vous », a-t-il déclaré aux congressistes.
Aline Mesples a, par ailleurs, rappelé à Jean-Baptiste Djebbari que son organisation militait pour l’expérimentation du platooning en France. « Le dispositif de décret pour les expérimentations sera mis en œuvre pour le début de 2020, a répondu le locataire de l’hôtel de Lassay (Paris). Il s’agira au préalable de poser le cadre des véhicules autonomes et, ensuite, de mettre en œuvre les premières expérimentations sur le platooning. » En conclusion de son discours, Aline Mesples a martelé à son interlocuteur que « nous attendons des actes car nous voulons seulement être défendus ». Jean-Baptiste Djebbari lui a fait part de sa « volonté de maintenir avec vous un dialogue qui soit sincère et ouvre des perspectives d’avenir pour votre secteur et la France en général ».