L’activité de mécano-soudage est un point clé du processus industriel de Fruehauf, qui fabrique bennes et porte-conteneurs et est resté fidèle à une approche de châssis mécano-soudés avec planchers oméga bois dur en véhicules « dry ». Ce choix permet de proposer en fourniture standard une capacité de roulage de chariots de 9 t à l’essieu (10 t et plus en option) et se traduit par une longévité opérationnelle dépassant largement la décade. Le châssis mécano-soudé est donc particulièrement adapté aux fortes exigences d’exploitation du marché français, entre autres dominé par la pratique de (dé)chargements à quai par chariots de manutention.
« Fruehauf a conceptualisé cette approche en pleine crise financière et a procédé à un repositionnement stratégique traduit lors de l’édition 2008 de Solutrans par le slogan “Conçu pour durer”, expliquait Gérard Buard, directeur commercial et marketing de la marque. L’offre de matériels “endurcis” à très forte longévité s’est accompagnée d’une politique d’intégration d’innovations importantes comme le radar de recul anti-collision RCP, le contrôle automatique de pression des pneus APCS ou la commande intérieure de monte et baisse. ».
Malgré le renchérissement des coûts de revient (et des prix de vente) l’orientation a été confortée par le marché français. Les transporteurs ont en effet pris du recul vis-à-vis des modèles économiques de locations financières attractives 48/60 mois reposant sur la recommercialisation des buy-back dans l’est de l’Europe et la revente spéculative des véhicules d’occasion.
« La crise financière a réduit les investissements de renouvellement de parcs et conduit à prolonger l’exploitation des semis au-delà des durées de financement, précisait le directeur commercial et marketing. Cela a mis en relief les capacités de vieillissement des remorques, leurs coûts d’entretien et leur TCO final, et matérialisé la durabilité et les qualités de nos véhicules. Le durcissement du crédit a recentré en France le financement des achats vers le crédit-bail à 60/72 mois et une exploitation opérationnelle de véhicules supérieure à douze ans. »
Après l’effondrement des commandes (de 45 unités à 4,5 unités/jour) consécutif à la crise, Fruehauf a pris des mesures drastiques fin 2008 et redressé progressivement sa situation. Il a ainsi pu accompagner dès 2010 la reprise du marché, élargissant régulièrement son offre commerciale. L’entreprise bourguignonne a produit 5 500 véhicules l’an passé avec un effectif de 760 personnes et réalisé un CA de 160 M€ pour 4,8 M€ de résultat avant impôts. Elle en a budgété 6 500 en 2019, et un CA de 185 M€, en hausse de 15 %. « Les résultats commerciaux sont encore en progression, déclarait Gérard Buard. Notre part du marché toutes marques en France a atteint 18,5 % en 2018, et 20,8 % fin mai, sur un total de 12 966 immatriculations contre 11 899 à la même période. Nous gagnons près de 2 % sur un marché lui-même en hausse de 8,9 %. Par famille de produits, nous passons de 32,3 % à 35 % en dry fret et immatriculons deux remorques PLSC sur trois et plus d’un fourgon sur deux. La part de marché des rideaux coulissants est de 31 %, celle des plateaux de 27 %, contre 22 % en porte-conteneurs et 10 % en bennes. » Ces résultats sont permis par un rythme de production accru (140 véhicules/semaine) grâce à la mise en place progressive du plan de modernisation décennal de la marque, pour lequel 16 M€ ont été budgétés. Ils résultent aussi de la politique continue d’élargissement d’offre menée depuis dix ans et toujours actuelle. Fruehauf présentera lors du prochain Solutrans une nouvelle gamme complète de remorques à essieux centraux et attelage haut visant la distribution de matériaux. Il lancera aussi la benne grand volume (55 m3) Agromax, une nouvelle carrosserie Liftop rehaussable au chargement (+/– 200 mm paramétrables avec quatre positions échelonnées par pas de 50 mm) et un plancher antidérapant au coefficient de glissement de 0,6.
Le salon lyonnais accueillera enfin la semi du projet Falcon piloté par Renault (cf. OT n° 2978).
Élément important de l’ambitieux plan de développement de Wielton et de Fruehauf, la restructuration du site icaunais vise à accroître ses capacités de production et en faire une des usines les plus modernes d’Europe d’ici dix ans. Cette transformation lui donnera la capacité de fournir les produits du groupe en Europe de l’Ouest et ses produits phares – fourgons, City et Urban – pour l’ensemble de l’Europe. La démarche s’inscrit dans une perspective d’usine 4.0 incorporant entre autres des îlots flexibles communiquants. Occupant 30 000 m2 d’ateliers couverts, l’unité de fabrication d’Auxerre est organisée en lignes regroupées par atelier : mécano-soudure, peinture, montage d’équipements et de carrosseries (fourgons et bâchées), fabrication de bennes acier, montage personnalisation des véhicules et pose de publicité.
D’une capacité d’environ 28 unités/jour, elle fonctionne dores et déjà en 3x8 et en flux tendu (0 stock, planification à la commande reçue…), sans ordonnancement de séries, 70 % des véhicules fabriqués étant customisés. Leur définition est assurée par un ERP configurant chacun d’eux et en générant un ensemble de plans numériques. La gestion de production (système GPAO) privilégie la réduction des temps de cycle et pilote l’activité, distribuant en juste-à-temps les plans numériques des composants aux îlots robotisés à débit flexible chargé de constituer les « panoplies » de pièces. Conformément au lean manufacturing, les machines (découpe, pliage, etc.) et stocks intermédiaires sont implantés en bord de lignes de fabrication et de montage.
En phase avec son projet d’investissements cadencés, Fruehauf a déjà installé de nouvelles machines de découpe et pliage haute performance (1,2 M€) et une ligne robotisée de fabrication de plateaux pour châssis standards 13,5 m (3,5 M€) fin 2018. Unique en Europe (le site Wielton de Wielu n’en dispose pas), elle approvisionne les lignes de montage de carrosseries et côtoie deux demi-lignes, destinées aux produits « spécifiques » (porte-conteneurs, remorques et semis City et Urban) et aux bennes acier. Ces deux lignes de production en mécano-soudure seront aussi robotisées, avec des mises en service espérées fin 2019 et fin 2020. La modernisation des bâtiments et des implantations est en cours. C’est aussi le cas de la robotisation de la ligne de bennes acier, qui atteindra une capacité de 650 unités/an.
Compte tenu du rythme d’accroissement de la demande et des coûts de la main-d’œuvre en Pologne (+/– 10 % par an), le site d’Auxerre, qui produit des véhicules « dry » et des bennes acier devrait à l’avenir (2020 ?) produire des bennes en aluminium.
F. B.