Facilités de gestion, économies, demandes des clients… Beaucoup de transporteurs ont sauté le pas de la numérisation. La plupart note néanmoins le manque de préparation des salariés à l’utilisation du matériel informatique, indispensable pour pouvoir en retirer tous les bénéfices.
Impossible de passer outre le numérique pour l’un des transporteurs participant qui a de grands industriels pour clients, les reportings doivent être journaliers, même s’ils ne demandent pas la géolocalisation de la marchandise à l’instant T. « La problématique principale reste l’informatique embarquée, note-t-il. Les conducteurs les plus anciens ont du mal à s’y mettre. Les nouveaux la maîtrisent en revanche sans problème. » Pour les transporteurs non équipés, le premier frein reste le coût non négligeable que cette modernisation représente, entre la mise en place d’un logiciel et l’équipement des conducteurs en smartphones. Un investissement vite rentabilisé selon leurs confrères équipés. Pour l’un des participants aux tables rondes qui envisage de passer au tout-numérique dans quelques semaines, un financement de 100 000 euros a été nécessaire. Pour cette entreprise de 45 salariés, le retour sur investissement devrait prendre moins d’un an, estime le chef d’entreprise. « Ces outils nous permettront des économies en imprimante, en stockage, indique-t-il. Et les lettres de voiture à fournir aux clients seront également numérisées et archivées automatiquement, ce qui nous fera gagner du temps. » Le transporteur a noté quelques inquiétudes parmi ses salariés quant au risque de pistage mais aussi une grande envie d’utiliser ces outils, particulièrement chez la jeune génération. « Ils se sentent prêts, explique-t-il en ajoutant qu’un argument de taille pèse dans la balance : ils disposeront d’un smartphone avec appels et SMS illimités. » La tâche devrait aussi être simplifiée pour les conducteurs qui, via une application, visualiseront leur tournée dès la veille et seront guidés jusqu’aux points de livraison. Dans certains cas, le changement se passe sans grande difficulté. C’est le cas d’un transporteur spécialisé dans les marchandises dangereuses, qui est passé à l’informatique embarquée il y a trois ans.
Le bon fonctionnement de la modernisation et l’acceptabilité des salariés ont surpris le chef d’entreprise : « Nous avons suivi une formation en interne puis une mise en situation. Les salariés ont réellement eu envie de connaître le fonctionnement. » Autre problématique rencontrée avec l’informatique, la dépendance que certains conducteurs ont développée envers les outils pour effectuer leur travail, particulièrement avec le GPS. « Ils ne savent plus utiliser une carte, indique un transporteur. Et cet outil les envoie systématiquement sur les autoroutes. »
« La contrepartie de la digitalisation, c’est l’accompagnement des salariés qu’elle implique », résume un transporteur. Un chef d’entreprise a pris l’initiative de faire appel à un prestataire qui rencontre chaque année les exploitants pour apporter des améliorations dans chaque tâche qu’ils effectuent sur les outils.
Pour les participants, les formations devraient inclure davantage de notions informatiques, particulièrement pour les conducteurs, même pour les bases. Certains ne sont pas à l’aise avec des fonctions telles que les boîtes mail. « Un chauffeur a découvert Android, un autre n’avait pas ouvert sa tablette pendant plus de cent jours parce qu’il ne savait pas qu’il fallait appuyer longtemps sur un bouton pour l’allumer, déplore un chef d’entreprise. Et il n’y a eu aucun retour sur le fait que les informations ne remontaient pas lors de ses services ! Il faut que 100 % des gens se sentent concernés pour éviter de telles aberrations ! » Alors qu’une réforme de la FCO (formation continue obligatoire) se prépare pour une entrée en vigueur en 2021, des modules pourraient inclure ce type de formation. Une partie commune, fixe, sera incluse dans les cinq journées obligatoires, et le reste pourrait devenir modulaire, selon les besoins des entreprises. « Il faut encore définir les modules utiles, mais ils pourraient être déconnectés du tronc commun et pas nécessairement suivis de façon consécutive, précise Loïc Charbonnier (au centre de la photo), P-dg d’Aftral et animateur de l’atelier. Ils pourront être répartis sur cinq années. »