Conformément à ce que lui demandaient les députés, Theresa May, la Première ministre britannique a obtenu de l’Union européenne un nouveau report du Brexit. Mais les élections européennes arrivant à grands pas, la question de la participation du Royaume-Uni se pose. Le Conseil européen a prévenu que : « Si le Royaume-Uni est encore membre de l’UE entre le 23 et le 26 mai 2019 et qu’il n’a pas ratifié l’accord de retrait d’ici au 22 mai 2019, il sera tenu de procéder aux élections au Parlement européen […]. Si le Royaume-Uni ne respecte pas cette obligation, le retrait interviendra le 1er juin 2019 ». Cette pression que l’Union européenne met sur le partant reste motivée par le fait qu’éviter une sortie sans accord reste l’objectif à atteindre des deux côtés de la Manche tant les enjeux économiques pèsent sur cette décision. Cependant, la Commission européenne se prépare activement au « no deal ». Ces dernières semaines, elle a accéléré sa communication afin de préparer les citoyens et les entreprises à cette perspective. Lors d’une récente conférence de presse, elle rappelait que « les entreprises n’auront plus la même facilité qu’avant pour se rendre au Royaume-Uni en cas de no deal. Elles doivent faire un effort de formation ».
S’agissant précisément du transport, la Commission européenne affirme qu’après la sortie du Royaume-Uni, une connectivité basique sera maintenue pour le transport routier afin d’assurer la liaison jusqu’à la fin de l’année, et le trafic eurotunnel se poursuivra aussi comme avant pendant neuf mois. Mais c’est sous réserve que le Royaume-Uni accorde un traitement réciproque aux opérateurs de l’UE. De quoi entretenir les incertitudes donc. « Si les importations de la Grande-Bretagne vers la France ainsi que les exportations de la France vers la Grande-Bretagne ne devraient pas poser de difficultés, une inquiétude demeure quant au nombre de déclarants douane en France pour faire face au passage de la nouvelle frontière après la mise en œuvre effective du Brexit », s’interroge Ghislain Landais, dirigeant des Transports Landais (44), qui ont le statut d’opérateur économique agréé (OEA). Nous ignorons si les clients seront prêts le jour J. Par exemple 50 % des PME n’ont pas de numéro EORI*, indispensable pour les formalités à l’importation et à l’exportation (hors Union européenne). Je crains que la majorité d’entre eux soit dans le déni du risque d’absence d’accord. » Lorsque l’on questionne une source de la Commission européenne sur le fait que les TPE-PME du secteur faiblement numérisées risquent de ne pas être prêtes pour passer la douane tranquillement au risque de bloquer les autres, elle répond que « les PME avaient deux ans pour se préparer. Elles doivent faire un effort. L’UE a mis en place un programme d’information, que peut-elle faire de plus ? » En effet, la Commission a mis en ligne plusieurs notices explicatives sur la traversée en l’absence d’accord ainsi que les tarifs douaniers si le Royaume-Uni devient un pays tiers. Finalement, ce nouveau report devrait permettre aux entreprises qui traversent la Manche de se préparer davantage. « Si ce nouveau report ne dissipe pas toutes les questions qui entourent toujours la date effective et les conditions réelles de sortie du Royaume-Uni, il constitue toutefois un délai de grâce qui doit être mis à profit », confirme L’Union TLF/TLF Overseas. L’organisation professionnelle invite les parties prenantes à « consolider et parachever le nouvel applicatif SI Brexit, clarifier les procédures de transit entre le Royaume-Uni et l’Union européenne et les mesures d’accompagnement pour pallier le manque de sites agréés du côté britannique ». Pour le moment, force est de constater qu’aucune partie prenante au Brexit ne maîtrise les règles du jeu. Espérons que cela ne tourne pas, d’après les termes de la presse britannique, à un « Halloween Brexit ».
Les tarifs douaniers temporaires publiés par le Royaume-Uni sont disponibles sur : https://www.gov.uk/government/publications/temporary-rates-of-customs-duty-on-imports-after-eu-exit
* L’Economic Operator Registration and Identification est un numéro d’identification unique en matière douanière, obligatoire depuis le 1er janvier 2017 dans l’UE. Il est nécessaire pour les formalités à l’importation et à l’exportation (hors Union européenne). À noter que les professionnels/opérateurs du commerce extérieur peuvent désormais effectuer de manière dématérialisée la demande d’octroi de numéro EORI, via le service SOPRANO-EORI de la douane.