Chaque année, 664 millions de lettres de voiture internationales « papier » sont utilisées en Europe, dont 3 % en France. De leur émission à la facturation du transport, le coût unitaire de chacune, tous traitements confondus, s’élèverait à 6,23 euros, selon les associations néerlandaises TLN et EVO contre… 1,69 euro pour leur version dématérialisée. Soit une division par plus de 3,5 à l’origine de gains partagés entre transporteurs et chargeurs. Tel est le message adressé, le 26 mars, par XPO Logistics avec son client Coca-Cola et son fournisseur d’informatique embarquée Trimble allié à TransFollow, filiale de Viatrans (IRU) spécialisée dans l’échange d’informations et de documents de transport électroniques. À l’issue d’un pilote lancé il y a plus d’un an, les quatre partenaires, accompagnés de la FNTR, ont présenté leurs résultats à la SITL. Et si les économies méritent d’être affinées, le test démontre que le temps de traitement d’une CMR par rapport à une e-CMR passe de onze jours à un seul jour, de son émission à la facturation du transport.
Interopérable par API avec tous les systèmes d’information et mobiles pour le pilotage des transports routiers (TMS, ERP, WMS, informatique embarquée…), TransFollow est le chef d’orchestre de la solution testée. Pour la création de l’e-CMR, elle structure l’échange électronique de données entre les parties d’un envoi : expéditeur, destinataire voire acheteur de la prestation, s’il est différent, et transporteur. « Pour les entreprises qui n’ont pas d’informatique embarquée et/ou de système d’information pour piloter leurs transports, TransFollow met à leur disposition une application mobile et son portail », précise son directeur, Alexis Perinet-Marquet. Dans le cas de XPO et Coca-Cola, TransFollow a été intégré à l’informatique embarquée Trimble, qui équipe la flotte du transporteur. « Grâce à cette approche non intrusive avec les systèmes en place, l’e-CMR est créée et transmise de façon automatique. Seules les signatures de l’expéditeur et du destinataire sur la tablette sont demandées au conducteur », explique Fabien Dusserre, directeur France de Trimble.
Tel est l’un des atouts de la solution testée avec « la possibilité d’éditer une CMR papier si le destinataire le souhaite », souligne Frédéric Lion. Cette souplesse relevée par le responsable Supply Chain de Coca-Cola France, qui opère 180 000 transports routiers par an, tous transporteurs confondus, soulève une condition nécessaire pour que l’e-CMR procure le plein rendement en temps et en coût mis en avant : son acceptation par tous les maillons de la chaîne. Un travail sur lequel, aujourd’hui, planche le distributeur de sodas auprès de ses clients, de la GMS en particulier. En interne en revanche, ses services transport et commerciaux l’ont adoptée. « Une fois les marchandises livrées, l’e-CMR avec ses informations, telles que les étapes horodatées du transport et ses éventuelles réserves écrites clairement, est retournée immédiatement via le portail TransFollow. » Des avantages dont profitent aussi XPO, qui la reçoit directement sur son TMS, et le destinataire, par mail ou au moyen du portail TransFollow, qui sert également de centre d’archivage.
Évitant les ressaisies, le TMS de XPO transmet les informations pour remplir la CMR à la solution TransFollow hébergée sur l’informatique embarquée Trimble. « Le conducteur garde la main et peut ajouter des renseignements supplémentaires comme des photos et des pièces jointes scannées à l’aide de notre tablette », indique Fabien Dusserre. Mis en exergue par Stéphanie Chanal, responsable des systèmes embarqués transport chez XPO Logistics Europe, les autres gains opérationnels de la solution testée sont « la visibilité de la chaîne jusqu’à la preuve de livraison, l’amélioration du service client, une facturation plus rapide et une réduction des coûts administratifs et de stockage ». À noter qu’elle intègre la dimension « contrôle » puisque les forces de l’ordre peuvent aussi être destinataires de l’e-CMR ou demander son impression papier. Aujourd’hui, XPO annonce son déploiement sur l’ensemble de sa flotte propre et la proposera à ses sous-traitants via son application mobile Drive XPO. De son côté, TransFollow souhaite avec Trimble l’étendre aux marchandises ADR et sous température dirigée, et travaille à son intégration simplifiée avec les systèmes d’information de pilotage des transports routiers.
Créée en 1956, la convention internationale de Genève dite « CMR » précise l’emploi de la lettre de voiture internationale dans le transport routier de marchandises. Pionnière, la France a autorisé son format dématérialisé dès 1999, anticipant un « protocole additionnel e-CMR » qui, depuis 2008, définit les modalités de la lettre de voiture internationale électronique sur la base de standards UN/CEFACT et GS1. Ce cadre a été conforté en France avec le décret n° 2017-1416 renforçant le caractère légal de la signature électronique qualifiée. « Rejoints par le Royaume-Uni prochainement, 19 pays ont ratifié le protocole additionnel e-CMR », indique Thierry Grumiaux, délégué à la commission de transport international douane et logistique de la FNTR. Conformément à ce cadre réglementaire, TransFollow accepte trois alternatives lors de la livraison : signature qualifiée au moyen de son application mobile TFA ou sur vitre (d’une tablette par exemple) et la livraison sans signature.