« Les candidatures se tarissant, nous avons pris l’initiative d’aller en car aménagé au-devant de nos futurs collaborateurs, qu’ils soient conducteurs, en recherche d’emploi, en reconversion… Et, pourquoi pas, convaincre des gens qui n’avaient jamais pensé à nos métiers de nous rejoindre », explique Isabelle Gaudin-Rouillard, chargée de pôle marketing et RH du groupe Mousset, lequel emploie 1 700 salariés sur 115 sites. L’idée est venue des conducteurs du groupe réunis en séminaire, il y a deux ans. En effet, chaque année, une trentaine de conducteurs représentatifs des métiers et des régions couverts par le groupe se retrouvent pendant deux jours pour réfléchir à une question stratégique aux côtés du P-dg, Frédéric Le Blanc, et des membres du CoDir. La session de 2017 était alors consacrée au manque de conducteurs qui commençait à peser sur l’entreprise. Leur idée a peu à peu pris forme et a abouti au bout de 18 mois. « J’ai pris en main le groupe de travail et, avec des collaborateurs de la formation, du recrutement, des managers et des conducteurs, nous avons mis en place un cahier des charges pour le projet de bus », précise Isabelle Gaudin-Rouillard. La vocation du bus n’est pas de recruter directement. Ce sont les managers, patrons de leur site, qui embauchent. Le bus apparaît davantage comme un lieu de rencontres où sont présentés une entreprise, ses hommes et ses métiers. Les animateurs du recrutement font connaissance avec des personnes et, s’ils détectent un intérêt potentiel chez une personne, la présentent au manager. Deux personnes aux profils complémentaires ont été recrutées pour cette tâche. Le premier, David Bénard, est un ancien conducteur qui a participé au séminaire 2017 et à la genèse du projet. « Il a postulé au recrutement d’animateur, un poste qui lui correspondait. Passé de son volant à un ordinateur pour le projet, il est animé par une passion et parle donc très bien de son métier et de son entreprise », indique Isabelle Gaudin-Rouillard. Charline Bricard, qui vient de l’extérieur, possède une formation en psychologie et en communication. Elle a passé un CAP de conducteur voyageur afin de pouvoir conduire le bus, comme son coéquipier. Tenir le calendrier à deux, avec les déplacements mais aussi la préparation que chaque étape requiert, devient de plus en plus compliqué et le groupe prévoit de recruter une troisième personne pour l’animation du bus. Outre les animateurs, la cellule regroupe également un coordinateur management, Hervé Szpera, qui travaille avec les managers sur les entretiens de recrutement et les cursus d’intégration des collaborateurs. Et une personne gère les annonces et de la collecte des CV. « Tout a été numérisé avec un logiciel en ligne qui permet une multidiffusion des annonces et une collecte des CV qui sont envoyés aux managers concernés », explique Isabelle Gaudin-Rouillard.
Le bus a démarré son tour en Vendée, fin janvier, puis a pris la direction de la Bretagne. Le planning se constitue au fur et à mesure de divers rendez-vous, comme les forums de l’emploi, les portes ouvertes de lycées techniques ou les Grands prix Camions. Entre ces rencontres, s’intercalent des visites à proximité des sites du groupe qui ont des besoins et dans les bassins d’emploi ou régions sinistrées en termes de chômage. « C’est une page blanche qui se remplit et nous regardons ce qui fonctionne pour attirer selon les endroits, selon les actions, selon le public, souligne Charline Bricard, animatrice recrutement pour le groupe Mousset. Même lorsque les recrutements n’aboutissent pas, chaque déplacement reste très enrichissant. Nous invitons ainsi également dans le bus les managers des sites locaux pour estimer leurs besoins, nous regardons quelles sont les opportunités à saisir dans chaque région, nous voyons les clients… » En amont de chaque étape, les deux animateurs doivent s’atteler à diverses démarches : autorisations de stationnement, contacts avec les agents de l’agence Pôle emploi locale, prospection sur les réseaux sociaux… « Les villes s’avèrent généralement très favorables à nous recevoir, remarque Charline Bricard. En revanche, nous rencontrons davantage de difficultés avec les agences Pôle Emploi, souvent difficiles d’accès. » Pour accueillir et informer les visiteurs, le bus a été entièrement réaménagé avec 3 tables et 12 fauteuils en carré, un grand écran qui diffuse les films de 2 minutes présentant les divers métiers ou encore des panneaux de témoignages de collaborateurs et du P-dg. « Nous informons les gens sur ce que ce sont réellement les métiers du transport car ils gardent souvent l’idée du “beauf routier”, déplore David Bénard, animateur recrutement. Or, ce n’est plus la même ère. L’informatique est très présente, le conducteur a aussi un rôle de commercial, d’ambassadeur de l’entreprise. En tant qu’ancien conducteur, je communique particulièrement sur ce que je ressentais lorsque je livrais. » Il faut être créatif aujourd’hui pour contribuer à l’image du secteur, souligne Isabelle Gaudin-Rouillard.
Les Transports Mousset se positionnent sur des filières de niche et des métiers très spécifiques comme le transport de volaille vivante. « Il faut excercer ce métier pour autre chose que la conduite parce que les temps non roulés sont presque plus importants, précise-t-elle. En général, les conducteurs attachés au métier aiment le milieu agricole, la relation avec les éleveurs, le travail en équipe. » Ce sont aussi des métiers de confiance, comme dans la filière de transport tri-température de produits haut de gamme pour des commerces. La livraison s’effectue beaucoup de nuit et les conducteurs disposent de la clé du commerce pour déposer la marchandise dans la chambre réfrigérée. « L’important n’est pas tant ce qui se passe entre le point A et le point B mais ce qui se passe avant et après », affirme Isabelle Gaudin-Rouillard. Sur les premières étapes effectuées, les deux animateurs ont constaté que le bus n’attirait pas seulement les jeunes. « Il attise la curiosité, les gens viennent parce qu’ils s’intéressent à la démarche de l’entreprise, note Charline Bricard. Certains viennent prendre des informations pour eux-mêmes ou pour des proches ». Et l’initiative a eu également une bonne répercussion en interne : « on sent une certaine fierté de la part de nos collaborateurs puisque cette idée fait partie de celles qui se sont matérialisées », souligne Isabelle Gaudin-Rouillard. Au-delà du concept du bus, la réflexion du recrutement est globale pour le groupe. Pour développer son image, des travaux sont notamment réalisés sur la notion de qualité, les conditions de travail ou encore la sécurité. « L’attractivité passe aussi par le renouvellement du matériel, souligne Isabelle Gaudin-Rouillard. Un parc récent attire forcément davantage qu’un parc ancien ». La fidélisation des salariés n’est pas en reste. Pour favoriser la communication au sein du groupe, Mousset fonctionne sur un mode de management très court. Dans ce même état d’esprit, les hommes de terrain sont également mis à contribution dans la stratégie du groupe sur des sujets qui les concernent via le séminaire conducteurs. La 3e édition, qui se déroulera cette année, reposera sur les innovations que l’entreprise pourrait mettre en place pour attirer et fidéliser les conducteurs de demain.