Après une croissance des immatriculations de 78 % en 2018, le parc PL alimenté au gaz en France compte 2 282 camions de plus de 3,5 tonnes*. Bus et BOM (bennes à ordures ménagères) inclus, cette flotte GNV s’élève à 7 000 unités (+ 23 % en 2018). En parallèle, le maillage national en stations publiques distribuant du gaz compressé (GNC), liquéfié (GNL), ou les deux, s’est étoffé. À fin 2018, on en recensait 123 dont une centaine accessibles aux PL. « Avec l’ouverture programmée d’environ 70 nouvelles stations GNV cette année, la filière confirme son objectif de 250 points d’avitaillement en 2020 », déclare Jean-Claude Girot, président de l’Association française du gaz naturel pour véhicules (AFGNV, 110 membres) qui a dressé un point d’étape le 15 février à Paris.
Aujourd’hui, les transporteurs disposent de plusieurs mécanismes incitatifs en faveur d’investissements dans des véhicules GNV. Présentés par Véronique Bel, directrice Mobilités chez GRDF, ils couvrent tout d’abord le gaz carburant « avec un gel de la TICPE au taux 2017 (0,076 €/kg) pendant cinq ans offrant une visibilité jusqu’en 2022. À l’instar des autres carburants, le gaz bénéficie en outre de la récupération totale de TVA ».
Côté véhicules, le suramortissement, reconduit dans la loi de finances 2019, a été prolongé jusqu’en 2021 et différencie désormais les véhicules : 40 % pour les camions de 16 tonnes et plus, 60 % pour les poids lourds de plus de 3,5 tonnes et inférieur à 16 tonnes, et 20 % pour les utilitaires de 2,6 à 3,5 tonnes. Le coût de la carte grise bénéficie aussi d’une exonération partielle ou totale. Quant au maillage de stations GNV, il est soutenu par les programmes Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), dont les aides apparaissent dans plus de 90 % des points d’avitaillement publics avec un parc associé de 2 500 véhicules.
À ces dispositifs nationaux s’ajoutent des initiatives locales et professionnelles. Au titre des collectivités territoriales, sept mécanismes d’aides sont opérationnels pour l’achat de véhicules et/ou la création de stations : Région Normandie (véhicules), Région Île-de-France (véhicules), Région Auvergne-Rhône-Alpes (véhicules et stations), Grenoble-Alpes Métropole (véhicules), Grand Lyon (véhicules), Région Nouvelle-Aquitaine (véhicules et stations), Paris (véhicules). Ils sont complétés ou portés par des programmes initiés par des syndicats d’énergies locaux.
Au titre des initiatives professionnelles, la FNTR a signé, le 9 janvier dernier, une convention avec Arkéa Banque Entreprises et Institutionnels mobilisant 50 M€ de prêts à taux bonifiés pour faciliter l’investissement des transporteurs vers des camions « propres ». Associée au Crédit coopératif, l’OTRE propose également une offre de financement baptisée PREVair pour ses adhérents désireux de s’équiper en véhicules « verts ».
D’ici à 2022 et 2030, l’AFGNV a dressé plusieurs hypothèses. Englobant les PL, bus, autocars et BOM, la flotte escomptée au premier temps de passage pourrait s’élever à 55 000 véhicules et à 220 000 au second. En termes de stations, les réseaux compteraient alors 680 puis 2 000 points d’avitaillement. La part du bioGNV serait de 20 % en 2022, le double huit ans plus tard. Aujourd’hui, on dénombre 80 sites de production de biométhane en France avec une capacité consolidée de 1,3 TWh permettant d’alimenter jusqu’à 4 000 véhicules lourds. « Plus de 660 sites sont en projet pour une capacité de 14 TWh capables d’alimenter jusqu’à 40 000 véhicules lourds », précise Véronique Bel. Voulue par les pouvoirs publics et l’Ademe, la production de biométhane est destinée prioritairement aux enjeux de mobilité (70 % de la consommation actuelle).
La mise en œuvre du suramortissement aux utilitaires de 2,6 à 3,5 tonnes ouvre de nouvelles perspectives au gaz carburant et à ses motorisations que la filière GNV souhaite étendre à tous les véhicules légers.
La France compte actuellement 10 800 véhicules et utilitaires légers fonctionnant au gaz. Expliquées sans doute par une politique nationale en faveur de l’électromobilité et une filière GNV focalisée sur les véhicules lourds à ce jour, ses ventes ont chuté de 37 % l’an passé avec 350 nouvelles immatriculations seulement. Cette tendance contraste avec celle observée dans les autres pays européens : + 60 % en Belgique, + 190 % en Allemagne ou + 140 % en Espagne. Marché mature avec plus de 1,3 million de véhicules et utilitaires légers GNV ainsi que 1 250 points d’avitaillement, l’Italie a progressé de 14 %.
Aujourd’hui, la France compte 95 stations gaz accessibles aux véhicules et utilitaires légers. Face à l’électrique adapté aux courtes et moyennes distances, le gaz carburant est présenté comme complémentaire par la Plateforme Automobile et Mobilités (PFA) pour les trajets longs « nécessitant des autonomies plus importantes et des temps de remplissage courts », note Vincent Rousseau, directeur mobilité durable de GRTgaz et président de la commission des affaires publiques de l’AFGNV.
Au moyen d’une politique en faveur des véhicules et utilitaires légers, la PFA estime possible d’atteindre un parc de 110 000 unités en 2023, 1 million en 2030 et 1,8 million en 2035. « Adossée à une offre disponible et variée, la part des immatriculations des véhicules et utilitaires légers GNV atteindrait 10 à 12 % d’ici à 2030 », indique Vincent Rousseau. À cet horizon, cette flotte pourrait être alimentée à 40 % en bioGNV (60 % en 2035).
Ce déploiement supposerait l’ouverture d’une centaine de stations gaz par an aboutissant à un réseau de 1 700 sites d’avitaillement d’ici à 2035. Le coût d’un tel réseau est évalué à 1,2 milliard d’euros. En contrepartie, l’atteinte de ces objectifs, susceptibles de profiter aussi aux poids lourds par la création de stations mixtes, éviterait l’émission de 9,5 millions de tonnes de CO2 sur la période 2019-2035 et jusqu’à 2 millions de tonnes à partir de 2035.
* Selon l’Observatoire du véhicule industriel, la part des motorisations GNV a représenté 1,8 % des immatriculations PL en 2018.