À Bruxelles, on a mis le grand braquet pour l’amélioration de la qualité de l’air dans l’Union européenne. Les initiatives sont publiques. Elles peuvent également émaner d’organisations privées, pas toujours désintéressées… On apprenait la semaine dernière qu’un accord avait été conclu entre le Parlement européen et le Conseil de l’Europe, avec la bénédiction de la Commission, pour l’introduction de nouvelles normes européennes (toujours plus strictes) sur les émissions de CO2 des camions (l’OT n° 2962). On apprend cette semaine qu’un groupement d’opérateurs européens de fret ferroviaire, Rail Freight Forward, dont le français SNCF Logistics et le belge Lineas font partie, a adopté un plan d’action en faveur du transfert du fret vers le mode ferroviaire. Ce plan d’action porte le nom de code « 30 by 2030 ». Comprenez : porter à 30 %, d’ici à 2030, la part du rail dans le transport de marchandises sur le Vieux Continent. Tout un programme ! Et noble initiative qui s’appuie en ce moment sur une campagne ludique destinée à sensibiliser le grand public : ce train de Noé – un train de marchandises – parti de Katowice (Pologne) où s’est tenue la conférence mondiale sur le climat en décembre dernier, qui relie les grandes capitales européennes. Il prête le flanc de ses wagons aux artistes des pays traversés, lesquels peuvent s’en donner à cœur joie pour laisser leur empreinte – décarbonée on l’espère – et colorée en faveur d’un monde sans camions (on exagère !). Le challenge est de taille pour les promoteurs de ce train présenté, sans rire, comme « la plus longue œuvre roulante d’art urbain au monde » : faire baisser la part (10 %, soit 275 millions de tonnes par an) du transport terrestre de marchandises dans les émissions totales de CO2 en Europe. Les membres de Rail Freight Forward brandissent l’arme de l’innovation pour mener à bien leur plan d’action, et ils s’en remettent aux pouvoirs publics afin que ces derniers les aident à mettre ce plan sur les rails au moyen d’une politique des transports axée sur le climat. Que dire de ces intentions, que chacun jugera au contact de ses propres convictions ? Qu’elles se heurtent, en tout cas, aux travaux et à la réflexion de personnalités qualifiées comme Maurice Bernadet, Philippe Brossette et Bernard Favre, auteurs du livre L’Avenir du transport routier de marchandises, qui sont arrivés à la conclusion que « le report modal n’existe que dans le sens du chemin de fer vers la route »… !
Éditorial