Un 73e congrès de combat

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L’organisation patronale a tenu son 73e congrès le 16 octobre, au Beffroi de Montrouge (92). La bonne santé du secteur n’a pas empêché ses dirigeants d’interpeller les pouvoirs publics sur un certain nombre de sujets sensibles. La ministre des Transports, Élisabeth Borne, est venue apporter quelques réponses tout en continuant d’entretenir le flou sur la (probable) future contribution du TRM au financement des infrastructures.

« Nous refusons toute fiscalité supplémentaire. L’écotaxe régionale, c’est non ! La suppression ou le rabotage de la ristourne gazole, c’est non ! La vignette, c’est non ! Les 4 centimes déjà versés au titre de la suspension de l’écotaxe doivent être identifiés comme une nouvelle contribution. » Tonnerre d’applaudissements dans une salle forcément acquise à cette position de fermeté. Fraîchement réélu à la tête de la FNTR, Jean-Christophe Pic s’est montré particulièrement offensif au moment de prononcer son discours devant la ministre des Transports, Élisabeth Borne, qui venait de prendre place dans la salle de conférence du Beffroi de Montrouge. « Il faut dissocier toute taxation supplémentaire de toute vertu écologique », a ajouté le président de la FNTR. « Je ne suis pas certaine de récolter autant d’applaudissements que Jean-Christophe Pic », a ironisé la ministre au moment de prendre la parole devant un public qui l’attendait forcément au tournant. « Notre réseau se dégrade, il a besoin d’investissements. Le Comité d’orientation des infrastructures a hiérarchisé les priorités. Il faut des décisions durables. Elles seront soumises à l’approbation du Parlement », a souligné Élisabeth Borne tout en rappelant qu’« il faut des ressources supplémentaires ». Allusion à cette enveloppe annuelle de 500 M€ qu’il faudra trouver d’ici à 2020 et pour laquelle d’aucuns ont vu, en filigrane, la contribution future du TRM au financement des infrastructures. Sous quelle forme sera récoltée cette enveloppe ? « Les décisions ne sont pas arrêtées. Toutes les options sont sur la table », a répondu la ministre des Transports à Jean-Christophe Pic. Lequel l’a également interpellée sur la nécessité de maintenir le TRM au titre des exemptés de la nouvelle fiscalité GNR. Il s’est offusqué, par ailleurs, que le secteur n’ait pas été intégré au plan hydrogène mis en place par le gouvernement. « Nous nous sentons concernés par l’accord de Paris sur le climat. Ce n’est pas avec des taxes que l’on parviendra à atteindre les objectifs. » Le président de la FNTR a indiqué que le secteur avait dépassé ses objectifs de calendrier en matière d’investissements dans les moteurs au GNV. Transition toute trouvée pour exhorter les pouvoirs publics à maintenir le dispositif – un moment menacé – de suramortissement pour les véhicules. « Nous prenons deux engagements : le taux de TICPE appliqué au GNV sera gelé jusqu’en 2022. Et le suramortissement pour l’électricité et l’hydrogène sera prolongé jusqu’en 2021 », a annoncé la ministre des Transports.

En Europe

Jean-Christophe Pic n’a pas manqué non plus de rappeler à Élisabeth Borne le ras-le-bol du secteur d’être pointé du doigt en matière de sécurité et de développement durable. Il a appelé les pouvoirs publics à s’engager pour « une Europe plus régulée ». Faisant allusion aux (laborieuses) négociations actuellement en cours autour du paquet Mobilité à Bruxelles et Strasbourg, la ministre lui a répondu que « le gouvernement s’engage pour une concurrence plus saine. Il défend un modèle de lutte contre la fraude et le dumping social. Il prône un renforcement des contrôles européens au travers, notamment, du chronotachygraphe numérique ». Élisabeth Borne a indiqué que, en matière de cabotage, le gouvernement était en faveur de la prise en compte des règles du détachement « dès la première heure » et qu’il prônait le retour obligatoire, dans son pays d’origine, non seulement du camion mais également du conducteur. « Mieux vaut pas d’accord qu’un mauvais accord », a affirmé la ministre au sujet du paquet Mobilité. Évoquant, en conclusion, les sujets sensibles du moment pour le TRM, elle a déclaré à propos du Brexit : « On travaille sur tous les scénarios » ; des VUL : « Je porte un projet d’harmonisation des règles d’accès à la profession et une extension de la réglementation sociale européenne à ce secteur ; des plateformes numériques : « Sans vouloir freiner le développement d’une économie numérique, il faut limiter les méfaits de la concurrence déloyale. » Élisabeth Borne a précisé que le dossier ferait l’objet de « débats parlementaires à venir ».

Aveu d’impuissance face à la léthargie de l’administration. En tout cas, la ministre n’a pas apporté de réponse à Jean-Christophe Pic au sujet des délais à rallonge de délivrance des permis de conduire et des cartes grises. Un président de la FNTR qui, dans la foulée, a dénoncé ce train de redressements qui fait suite à la requalification, par les pouvoirs publics, des entrepôts logistiques en entrepôts industriels, à l’origine d’une fiscalité supplémentaire pour les transporteurs. « Inacceptable pour nos entreprises », a lancé le président de l’organisation patronale, qui a ajouté que la commission paritaire de branche était en cours de création.

La météo du TRM au vert

C’est un classique à chaque congrès de la FNTR : Stéphane Latouche vient livrer le bulletin de santé le plus récent du TRM. En la matière, le directeur régional Nord-Pas-de-Calais de la Banque de France s’est rendu à Montrouge avec de bonnes nouvelles. « La filière retrouve du souffle. Le paysage est favorable », a souligné le dirigeant en se référant à une période courant de 2012 à 2017. Le contraste a également évolué. Ainsi, selon Stéphane Latouche, une entreprise de TRM sur deux n’existait pas il y a huit ans ; 6 dirigeants sur 10 ont moins de 50 ans ; pour 1 défaillance (le chiffre diminue chaque année), on compte 3 créations d’entreprises ; 2 entreprises sur 3 ont enregistré une hausse de leur chiffre d’affaires en 2017 et 3 sur 4 ont été bénéficiaires. En 2017, le chiffre d’affaires de la filière a progressé de 5 %. (+ 4,3 % pour les entreprises toutes branches). « Il y a un effet gazole », a précisé le dirigeant. Lequel assure que le secteur continue de créer des emplois même si la tendance tourne au ralenti en 2018.

La bonne santé de l’économie française en 2017 – certains économistes y voient toutefois, à terme, des risques de déflagration en raison d’un recours massif à l’endettement – a, bien entendu, profité aux entreprises françaises de TRM : 2 sur 3 ont connu une hausse de leur activité et 33 % une croissance nulle ou négative. En matière de rentabilité, le taux de marge brute d’exploitation a progressé de 6,6 %, celui de la valeur ajoutée de 37,5 % (38,4 % en 2016). Stéphane Latouche met cette baisse du taux de valeur ajoutée sur le compte du renchérissement du coût du gazole et sur celui du recours à l’intérim (+ 8,6 %) et à la sous-traitance. En raison, bien entendu, de la pénurie de main-d’œuvre.

Combien a rapporté un salarié en 2017 50 000 €, selon l’étude de la Banque de France. Combien a-t-il coûté 39 400 €. Combien le CICE a-t-il rapporté par salarié 1 600 €. Autres chiffres délivrés par Stéphane Latouche : le taux d’investissement représente 18,7 % de la valeur ajoutée ; le ratio résultat net/chiffre d’affaires est en progression continue depuis 2012, à 2,2 % (3,8 % dans le reste de l’économie) ; 75 % de la valeur ajoutée dans les entreprises sont consacrés aux charges de per­sonnel. « On reste au-dessus du niveau de l’économie. » Quant à l’autofinancement, il est passé de 12 % à 15 % entre 2012 et 2017. Enfin, les fonds propres sont en augmentation, de 28 % en 2012 à 31 % en 2017. « Le TRM est une filière qui possède un haut niveau de solvabilité, supérieur à celui de l’économie française », a conclu Stéphane Latouche.

Le 73e congrès de la FNTR était placé sous le signe de la jeunesse, des « nouveaux souffles ». En ouverture, l’économiste Nicolas Bouzou, partisan d’une économie libérale, est venu rappeler à la tribune que « dans l’histoire de l’innovation, les deux secteurs qui changent le plus sont ceux de la santé et de la mobilité ». Il a qualifié de « troisième révolution industrielle », l’émergence combinée du numérique, de la robotisation et de l’intelligence artificielle. Dénonçant la mise en place du RGPD, Nicolas Bouzou a affirmé que « le big data, l’échange de données, était le nerf de la guerre ». Autant de données qu’il faudra fournir au camion autonome « pour que ça marche ».

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