Sur le podium européen au début des années 2000. Sur la cinquième marche en 2016. L’activité du pavillon français du TRM, mesurée en tonnes kilomètres, a payé un lourd tribut à la crise économique et financière de 2008-2009, ainsi qu’à la montée en puissance de l’étendard polonais (qui talonne celui de l’Allemagne) sur les routes du Vieux Continent. Avec son 8 % de parts de marché en Europe, le pavillon français se situe donc (en 2016) au 5e rang des flottes continentales, derrière l’Allemagne, la Pologne, l’Espagne et le Royaume-Uni. « L’activité du premier pavillon européen est 2 fois plus élevée que celle du pavillon français », observent les auteurs de l’étude produite par le Commissariat général au Développement durable du ministère de la Transition écologique et solidaire (Data Lab).
Les pays d’Europe de l’Est et centrale ont, dès leur intégration dans l’Union européenne, pris position sur le marché de la longue distance en Europe. La Pologne, la première, a surfé de façon spectaculaire sur la libéralisation du marché du TRM, notamment celle du cabotage. Ce pays est sorti sans encombre de la crise financière de 2008 et s’est propulsé sur la deuxième marche du podium dès 2012. Alors que l’activité des flottes européennes reculait de 10,5 % entre 2007 et 2009, celle du pavillon français dégringolait, pour sa part, de 20,8 %. Un léger rebond est observé par la suite, jusqu’en 2012. Puis, ce sera la rechute jusqu’en 2014, avant un frémissement de reprise en 2014, confirmé et raffermi en 2016 (+5,1 %), et qui ne s’est pas démenti jusqu’à ce début d’année 2017. Selon le Data Lab, l’Allemagne, l’Espagne, l’Autriche, l’Irlande et la Suède en ont été les premiers bénéficiaires. L’Italie n’a pas su profiter de cette embellie, depuis 2010.
En l’espace de 20 ans, indique l’étude du Commissariat général au développement durable, l’activité générée par les poids lourds immatriculés en France métropolitaine a reculé de 13,6 %. Elle est passée de 180,2 milliards de tonnes-kilomètres en 1966 à 155,8 milliards de tonnes-kilomètres en 2016. Après une légère progression entre 1996 et 1999, elle s’est stabilisée en 2004 pour remonter en 2007, avant la crise. Laquelle n’est pas le seul facteur à l’origine des mouvements baissiers de l’activité du TRM : « la concurrence des VUL et celle des pavillons étrangers contribuent à cet important recul », souligne l’étude. Un recul qui prend fin en 2016.
Tout au long des mouvements de regression de l’activité, le tonnage transporté est demeuré quasi stable entre 1996 et 2016. « En moyenne annuelle, le tonnage transporté entre 1999 et 2004, puis entre 2005 et 2007 a augmenté plus vite que les tonnes kilomètres », précise le Data Lab.
Moins 15 % entre 1996 et 2015 : compte d’autrui et compte propre ont connu la même évolution (en termes d’activité) en l’espace de 20 ans. 2004 et 2007 ont été des années de « pic » pour le compte d’autrui. Les années post-crise de 2008 ont, à l’inverse, précipité la décrue de son activité. En parallèle, beaucoup d’entreprises ont procédé à une modification de leur organisation en internalisant leur transport de marchandises, avec comme corollaire, une montée du compte propre. Reste que, malgré ces mouvements de balanciers, le TRM pour compte d’autrui tient la pole position : 78,7 % des tonnes kilomètres en 1996 ; 84 % à 86 % entre 1999 et 2009 et, léger repli, 76,8 % en 2016. À noter que la part de tonnes-kilomètres effectuées par des véhicules loués est passée de 10,1 % à 13,7 % entre 1996 et 2016.
En l’espace de 20 ans, le gâteau français a été divisé par deux sur la zone longue (au moins 500 km). Le compte propre a été le premier à perdre des positions significatives. C’est un euphémisme : cette spectaculaire retraite du pavillon français est à mettre au crédit de l’émergence des flottes étrangères, d’Europe de l’Est surtout. Sur les moyenne (entre 150 km et 500 km) et courte (– 150 km) distances, « les évolutions sont proches, avec une croissance de l’activité qui atteint son maximum en 2007 avant de connaître une période de recul, malgré une reprise ponctuelle en 2010 et 2011 ». Le pavillon français s’est véritablement recroquevillé sur l’Hexagone entre 1996 et 2016 : la part de la longue distance dans son activité est passée de 40,6 % à 25,3 %. « La part des trajets de moyenne distance est devenue la plus importante depuis l’an 2000 et celle sur courte distance dépasse celle sur longue distance depuis 2009 », souligne l’étude. Depuis 2002, la part de l’activité moyenne distance est comprise entre 41 % et 48 %.
Quant à l’activité du compte propre, elle s’effectue majoritairement sur courte distance. Sa part est comprise entre 32 % et 44 % sur les 20 dernières années. Depuis 2000, la part de son activité sur longue distance pèse moins de 10 %.
L’activité internationale du pavillon français a chuté de 73,4 % entre 1996 et 2016, selon les chiffres d’Eurostat et de SDES cités par l’étude. Ainsi, la part de l’international dans l’activité des entreprises françaises de TRM est passée de 24,3 % en 1996 à 7,5 % en 2016. La crise économique n’en est pas le seul facteur exogène. La concurrence des pavillons européens a fortement contribué à ce repli. Où il est question de cabotage, dont la part accapare 6,3 % des flux de TRM dans l’Hexagone en 2016. Cette part était de moins de 1 % avant l’an 2000. En Allemagne, elle se situe à 5,9 %, en Autriche à 5,8 % et en Belgique à 6,5 %, précise l’étude du Data Lab.
Le transport agricole et le transport agroalimentaire sont les spécialités qui ont le moins souffert du repli général de l’activité française à l’international et en France, sous l’effet du cabotage. Leur part s’établit à 31,3 % des marchandises transportées en 2016. La prépondérance de cette spécialité de transport est telle qu’elle a compensé, à elle seule, la baisse significative des produits manufacturés entre 2009 et 2016. Dans le même temps, la part de l’activité du transport de marchandises dangereuses a progressé pour atteindre 6,4 % de l’ensemble des spécialités de transport en 2016.
Au fil du temps, la capacité des poids lourds et le niveau moyen des charges ont augmenté entre 1996 et 2016. « Le tonnage moyen par trajet en charge est passé de 12,1 t en 1998 à 14 t en 2016 », observent les auteurs de l’étude qui précisent – ce n’est plus une surprise – que 25 % des trajets sont effectués à vide. Un phénomène qui affecte davantage le compte propre que le compte d’autrui.
En 20 ans, le trafic des poids lourds a reculé de 12 %, passant de 19,1 milliards de kilomètres parcourus en 1996 à 16,8 milliards en 2016. Les distances parcourues sur une année ont également diminué : elles sont passées de 44,8 milliers de kilomètres à 39,1 milliers, soit un recul de 12,7 %. « Toutefois, indique l’étude du Commissariat, l’ampleur de l’évolution est différente selon le type de véhicule : le kilométrage parcouru par les camions a diminué de 29,3 % alors que celui des tracteurs routiers ne baissait que de 1,2 % ».
Entre 1997 et 2002, le parc de véhicules industriels de 15 ans ou moins (sur la France métropolitaine) est passé de 420 000 à environ 480 000. « Depuis 2006, il se maintient avec environ 430 000 unités », souligne l’étude. La quasi-totalité des véhicules circule avec des motorisations au diesel. Cette photo prise jusqu’en 2016 exclut donc l’exercice qui vient de s’achever par une forte montée en puissance du gaz dans les flottes pour compte d’autrui. À noter que la part des tracteurs dans le parc industriel global a augmenté, de 42,9 % en 1997 à 46,2 % en 2016. Ils ont « trusté » à eux seuls 88 % des opérations contre 84 % il y a 20 ans.
Les années passent et les donneurs d’ordre continuent de privilégier le mode routier pour leur transport de marchandises. Celui-ci représente 80 % des opérations tous modes confondus. En 1952, ce chiffre était de 30 %, le mode ferroviaire accaparait 60 % de ces prestations contre 17,3 % en 2016 (3,6 % pour le fluvial).