« La possibilité d’un vide sur la protection sociale des conducteurs »

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Depuis qu’il a été exclu de la révision de la directive « détachement », le TRM est l’objet de discussions âpres au sein des instances européennes. Le point avec Christine Revault-d’Allonnes-Bonnefoy, rapporteure sur la révision de la directive Eurovignette.
L’Officiel des Transporteurs : Si l’on effectue un point d’étape sur le Paquet Mobilités, que peut-on dire de ce qui se joue en ce moment à Bruxelles et Strasbourg pour le TRM ?

CHRISTINE REVAULT-D’ALLONES-BONNEFOY : Au niveau du travail parlementaire européen, sur le Paquet Mobilité, on en est au stade du travail sur les différents rapports. On en compte 5 sur la table pour le volet social, et 4 sur le volet environnemental. Sur le premier volet, il y a un premier texte sur le détachement des travailleurs du secteur des transports, et d’autres sur le cabotage, le tachygraphe, les temps de repos/conduite et les redevances routières.

Que peut-on dire des discussions sur le travailleur détaché ?

C. R. A. : Elles n’ont pas encore été politiquement mises en place car nous attendons la présentation du rapport pour janvier 2018. C’est à partir de cette date que viendront les amendements contradictoires et le débat. Sans attendre ce moment formel, on est d’ores et déjà habités par quelques inquiétudes. On (la délégation socialiste française et européenne, Ndlr) a été en désaccord total avec l’accord trouvé, fin octobre, par le Conseil sur la révision générale de la directive des travailleurs détachés.

En tout état de cause, les discussions entamées sur le transport s’avèrent déjà complexes car on rencontre un certain nombre de députés européens qui sont partisans de l’absence de règles pour le transport international. C’est pour cette raison que nous souhaitions que le transport soit maintenu dans le texte général sur la directive détachement. Je souligne que les députés (socialistes) roumains et espagnols n’y sont pas, eux, favorables.

Vous avez récemment rencontré Élisabeth Borne, la ministre des Transports, au Parlement européen. Qu’est-il ressorti de votre entretien ?

C. R. A. : Elle partage très clairement nos inquiétudes. Du coup, je me demande comment elle se positionne par rapport au gouvernement auquel elle appartient qui avait qualifié de « victoire » l’accord au Conseil d’octobre dernier. Elle se rend bien compte que la situation va s’avérer extrêmement compliquée. Notre inquiétude porte sur la possibilité d’un vide sur la protection sociale des conducteurs routiers.

Peut-on dire que la loi Macron, dans ce contexte, constitue un garde-fou ?

C. R. A. : La loi Macron est un bon dispositif. Vous savez que la Commission européenne demande à la France de retirer ce dispositif. Tant qu’on pouvait compter sur les principes de la directive de 1996 qui incluait le secteur des transports dans le socle général des travailleurs détachés, on pouvait continuer de dire – en France — que les dispositions de la loi Macron s’appliquent et ne sont pas du tout « hors la loi ». Mais, à partir du moment où les gardes fous de la directive de 1996 n’existent plus – puisque l’accord du conseil d’octobre dernier a sorti les transports – la Commission européenne et certains pays pourraient tout à fait se retrouver fondés à demander le retrait des dispositions de la loi Macron. C’est un risque…

Que peut-on dire du rapport de force actuel entre le groupe mené par la Pologne et les pays qui forment l’Alliance du routier ?

C. R. A. : L’Alliance du routier, qui rassemble 8 pays soudés, a rallié 11 pays de l’UE. Mais cela ne suffit pas pour peser dans le rapport de force, pour dégager une majorité au 3/5e . Je suis très inquiète.

Pensez-vous que ce qui guette c’est une totale libéralisation du secteur du transport routier en Europe ?

C. R. A. : À partir du 1er janvier, la Bulgarie prend la présidence du Conseil. Ce pays est opposé à l’existence d’un cadre social dans le secteur des transports routiers. Je ne vois pas, par conséquent, comment il va défendre une ligne qui n’est pas la sienne dans les discussions entre le Parlement européen, la Commission et le Conseil.

Êtes-vous d’accord avec Florence Berthelot, la déléguée générale de la FNTR, qui déclarait récemment que, au travers des décisions qui seront prises sur le TRM, c’est l’avenir de l’Europe qui se joue ?

C. R. A. : Je suis d’accord. Il est temps que l’Europe s’attache à donner un cadre et une protection aux citoyens européens au risque que ces derniers n’aient plus confiance dans l’Union. Que des organisations comme la FNTR en aient conscience est très important.

Quel est le calendrier pour les prochains mois ?

C. R. A. : En avril 2018, nous aurons un vote, en commission Emploi et en commission Transport, sur les rapports liés au temps de repos, au tachygraphe, au cabotage et aux travailleurs détachés dans le secteur des transports. On espère entrer en discussion avec le Conseil et la Commission dès la fin de juillet ou en septembre. Si nous n’avons pas de textes ni de discussions entre mi-2018 et fin 2018, je crains que nous n’ayons pas de Paquet Mobilité car nous entrerons en campagne électorale pour les élections européennes de 2019. Et comme ils auront réussi à sortir le transport de la révision générale de la directive détachement, on risque de se retrouver sans texte législatif pour protéger les chauffeurs routiers.

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