ELISABETH BORNE : Je pense qu’il y a eu un certain nombre de malentendus. On va expliquer les discussions qui ont eu lieu et ce qu’on a consolidé avec cet accord.
E. B. : Je veux être très claire : le transport routier est bien couvert par le droit du détachement. Le gouvernement s’est engagé à ne pas lâcher le transport routier. Alors que certains pays voulaient l’exclure du droit du détachement, nous nous y sommes opposés tout au long de la négociation. C’est ce qui l’a rendue longue et difficile. Nous avons tenu bon, et je pense que nous avons fait bouger les lignes avec un certain nombre de pays et notamment l’Allemagne pour faire avancer la protection des travailleurs du transport routier. Je vous confirme que la directive de 96 s’applique au secteur. En France, on a pris les devants avec la Loi Macron, très protectrice et qui prévoit déjà une rémunération identique pour tous les chauffeurs, quelle que soit leur origine, selon le principe « à travail égal, salaire égal ». Cette loi va continuer à s’appliquer. La France sort renforcée car cette négociation a confirmé son approche. La discussion va se poursuivre sur les règles de mise en œuvre propres au transport routier dans le cadre du Paquet Mobilité. Nous avons refusé toutes les exceptions, notamment sur les seuils de déclenchement du détachement, demandées par un certain nombre d’états, sur le transport international et le cabotage. Ce socle solide étant posé, on va aborder sereinement les discussions sur les spécificités du transport routier dans le cadre du Paquet Mobilité. On va traiter également d’autres sujets comme le contournement de ces règles par le recours croissant aux VUL. D’ici la fin du mois, je nommerai un parlementaire pour travailler sur le sujet. En ce qui concerne les contrôles, nous allons nous battre pour avoir un calendrier raccourci pour le déploiement des futurs chronotachygraphes afin d’améliorer nos contrôles.
E. B. : Je ne peux pas laisser dire ça. Par ce compromis, il est désormais reconnu par les États membres et par la Commission que les règles du détachement s’appliquent au transport routier. Si la Commission a déclaré que la directive détachement s’applique aux transports, elle ne va pas contester les mesures prises au niveau national pour appliquer cette directive. Le principe « à travail égal, salaire égal » de la Loi Macron protège déjà les conducteurs routiers français et ils vont continuer à l’être contre tout risque de dumping social.
E. B. : L’application de la directive n’est pas immédiate. Je ne veux pas qu’on se précipite mais que nous soyons forts dans la discussion sur le Paquet Mobilité. Je veux que nous discutions des enjeux du secteur, pour avoir un bon accord, notamment sur des points qui me sont chers : les contrôles, l’accélération du déploiement du chronotachygraphe ou encore le détournement des règles par des VUL. Il n’y a aucune raison que l’on travaille dans l’urgence alors qu’un droit protecteur s’applique déjà aux 700 000 salariés français du transport routier. Par ailleurs, dans la lancée des contrôles déjà menés, on vérifiera demain le fait que les conducteurs étrangers perçoivent effectivement le salaire minimum. Les partenaires sociaux viennent de conclure à l’unanimité, au niveau national, un accord sur les règles de rémunération dans la branche. Ces règles vont s’appliquer aux conducteurs détachés.
E. B. : La Commission, le Parlement et le Conseil ont acté le fait de conforter le droit du travailleur à l’échelle européenne et l’application de la directive détachement au transport routier. Ceci dit, on a encore du travail à faire vis-à-vis de certains pays de l’Est pour les convaincre de la nécessité de mettre un haut niveau de protection sociale pour les travailleurs en Europe. Avec l’accord que nous venons d’obtenir, nous abordons ces négociations, confortés.