Cette réforme a pour but de faire changer l’état d’esprit du Code du travail, l’adapter au monde qui change, le tout dans un cadre juridique dynamisant car sécurisé », a déclaré Édouard Philippe. Regroupées sur un document de 159 pages, 36 mesures visent ainsi à réécrire et à amender le Code du travail actuel. Licenciements, interactions entre accords de branche et accords d’entreprise, indemnités prud’homales ou encore négociations, beaucoup de modifications visent en particulier les TPE et PME de moins de 50 salariés. « Le texte présenté est définitif », a précisé le Premier ministre. Des modifications pourraient apparaître après la consultation des syndicats de salariés, mais « uniquement à la marge ». Présenté en Conseil des ministres le 22 septembre, il devra être paraphé par Emmanuel Macron. L’application des ordonnances aurait lieu dans la foulée, avant la fin du mois pour les mesures non soumises à la publication d’un décret comme celles concernant les indemnités prud’homales. Présentation en 10 points.
« Il n’y a que 4 % de délégués syndicaux dans les entreprises de moins de 50 salariés », a souligné Muriel Pénicaud, la ministre du Travail. Pour y remédier, le gouvernement veut élargir le droit à la négociation à toutes les PME de moins de 50 salariés. Jusqu’à 11 salariés, l’employeur pourra ainsi soumettre à référendum un projet d’accord sur l’ensemble des thèmes ouverts à la négociation d’entreprise. Cette possibilité sera ouverte aux entreprises de 11 à 20 salariés sans élus du personnel. Dans les entreprises comportant entre 20 et 50 salariés, la négociation sera possible avec un élu du personnel non mandaté.
Le délai pour saisir les prud’hommes après un licenciement sera limité à un an pour tous les types de licenciements. Aujourd’hui, il est d’un an pour les licenciements économiques et de deux ans pour les autres licenciements. Le plafond de dommages et intérêts sera fixé à un mois de salaire à partir d’un an d’ancienneté. Il augmente d’un mois par année jusqu’à 10 ans, puis d’un demi-mois par année. Il ne pourra dépasser 20 mois au-delà de 28 ans d’ancienneté. Pour les TPE (moins de 11 salariés), le plancher sera fixé à 15 jours à partir d’un an d’ancienneté. Il augmentera progressivement, pour atteindre deux mois et demi à partir de neuf ans d’ancienneté.
« Nous avons précisé et enrichi le rôle de la branche qui se trouve ainsi renforcé », a souligné Édouard Philippe. Les minima salariaux, la classification des métiers, la protection sociale complémentaire, la formation et l’égalité professionnelle restent dans les branches. Sur quatre autres thèmes, la pénibilité, la prévention des risques professionnels, le handicap et les conditions d’exercice d’un mandat syndical, les branches pourront choisir de conserver ou non la primauté.
De nouvelles branches pourront accéder au « CDI de chantier » qui permet à une entreprise d’embaucher un salarié sur une durée beaucoup plus longue qu’un CDD. La fin du contrat correspond à la fin du chantier, elle n’est donc pas fixée par une date. Réservé jusqu’à présent aux secteurs du bâtiment et des travaux publics, ce type de contrat pourra être utilisé dans les branches professionnelles qui auront négocié et signé un accord fixant des règles précises.
Une instance unique nommée « comité social et économique » (CSE) remplacera le comité d’entreprise (CE), le CHSCT et les délégués du personnel dans les entreprises de plus de 50 salariés. « Un lieu où communiquent l’économique et le social », a indiqué la ministre du Travail Muriel Pénicaud. Dans les entreprises de plus de 300 salariés et dans les secteurs sensibles, il y aura une commission sur les sujets de santé, les conditions de travail et la sécurité, par accord majoritaire.
Pour être validés, les accords d’entreprise devront être approuvés par des organisations représentants 50 % des voix, et non plus 30 % comme aujourd’hui. Muriel Pénicaud a évoqué des « accords majoritaires simplifiés », notamment sur le temps de travail.
Les indemnités légales de licenciement sont augmentées de 25 %. Ainsi, un salarié qui gagnait en moyenne 2 000 € par mois, licencié après 10 années d’ancienneté, verra son indemnité légale passer de 4 000 € à 5 000 €.
Les ruptures conventionnelles, séparation à l’amiable entre un salarié et son entreprise, ne peuvent être conclues aujourd’hui qu’individuellement. Les entreprises pourront définir un cadre commun de départs volontaires par accord homologué par l’administration.
En cas de vice de forme lors d’un licenciement, la sanction ne peut excéder un mois de dommages et intérêts. Le vice de forme n’empêche pas un examen du dossier sur le fond. Pour éviter les erreurs de procédure, les employeurs et salariés auront accès à un formulaire type indiquant les droits et devoirs de chaque partie lors d’un licenciement.
L’un des cinq projets d’ordonnance est consacré au compte pénibilité désormais renommé « compte professionnel de prévention ». Ce C2P confirme les annonces faites par le Premier ministre dans une lettre du 8 juillet 2017. Il serait recentré sur les six facteurs de risque d’origine et les quatre autres(1) seraient associés à un dispositif de départ anticipé à la retraite conditionné à une incapacité permanente.
(1) Les six critères retenus seraient le travail de nuit, répétitif, en horaires alternants ou en milieu hyperbare, ainsi que le bruit et les températures extrêmes. Sortiraient du dispositif : les manutentions manuelles de charges, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et les agents chimiques dangereux.