Pour assurer un service de transport de voyageurs autour de Saint-Malo (35), Alexandre Collyer, grand-père de Gilles Collyer, crée en 1920 la société des Autocars Collyer. L'entreprise sera vendue en 1946 aux Courriers Bretons. Mais la famille Collyer ne renonce pas pour autant au transport routier. En 1950, René Collyer, qui avait travaillé avec son père, prend le relais, côté marchandises, en créant, toujours dans la cité des Corsaires, Les Routiers Bretons. Avec un seul véhicule, il transporte de la glace et se spécialise dans la distribution dans la région de Pontorson et du Mont Saint-Michel. Dès 1955, Les Routiers Bretons disposent de six camions et se diversifient dans le transport de lots. En 1976, l'entreprise compte 25 poids lourds, puis 50 en 1986, lorsque René Collyer prend sa retraite. Il scinde alors son entreprise en deux, pour assurer sa succession. A sa fille, il confie l'activité de location (Locatex) et les Transports Collyer (25 véhicules) basés à Rennes. Les deux sociétés existent encore et réalisent une part importante de leur chiffre d'affaires avec l'usine locale du constructeur automobile Citroën, via Gefco. Gilles Collyer, qui travaille déjà depuis 10 ans avec son père, reçoit en héritage la société des Routiers Bretons, spécialisée dans le transport public de marchandises. Implantée à Saint-Malo (35), elle emploie alors 25 personnes pour un parc de 25 véhicules. Elle effectue principalement du transport à la demande.
Gilles Collyer développe immédiatement les systèmes de relais de conducteurs qu'il avait commencé à mettre en place avant le départ de son père (Rennes-Brest et Rennes-Paris), vers d'autres activités et produits. C'est sur cette organisation spécifique et rigoureuse que s'est basée depuis la croissance des Routiers Bretons.
En 1989, l'achat des Transports Le Donche, situés à Quimper et spécialisés dans le transport à la demande de produits secs (15 véhicules), constitue le seul vrai point noir dans l'histoire des Routiers Bretons. L'opération de croissance externe tourne mal. En 1994, la société Le Donche est mise en location gérance, avant d'être vendue en 1995. En six ans, elle aura engendré une perte financière de 6,5 MF pour son acquéreur. Une fois ce problème réglé, en 1995, Gilles Collyer décide de transférer définitivement l'activité des Routiers Bretons de Saint-Malo vers Rennes, centre névralgique de ses relais de conducteurs et de son exploitation. Seul le siège social de l'entreprise reste dans la cité des corsaires.
« Nous devions déménager car Saint-Malo est mal situé. C'est un véritable « cul de sac » au niveau des infrastructures », explique Gilles Collyer. De plus, le chiffre d'affaires du site malouin commençait à stagner alors que l'activité économique sur la région de Rennes était, elle, en fort développement. « Il y avait également des doublons d'exploitation et d'atelier, à 80 km de distance », ajoute le chef d'entreprise. Le déménagement n'a posé aucun problème aux 75 salariés, la majorité d'entre eux étant célibataires.
Après une première phase pendant laquelle l'entreprise s'installe sur un terrain en location, « nous avons acheté un terrain où nous nous sommes installés le 1er octobre 1995, passant d'une surface de 7 500 m2 à 15 000 m2 », précise Gilles Collyer. Dès lors, nichés à Bruz, au sud de Rennes, non loin de l'usine Citroën et tout près de l'agence locale de Gefco, Les Routiers Bretons entament une période d'intense développement économique. Aujourd'hui, ils occupent 35 000 m2 de terrain en conservant une capacité d'extension de 7 000 m2. Gilles Collyer anime aujourd'hui une équipe de 200 salariés avec 88 véhicules. Le CA s'établit, pour 2000, à 94,9 MF, contre 14,8 MF en 1986.
Après avoir mis en place en 1986 une exploitation basée sur les relais de conducteurs, Les Routiers Bretons se sont lancés dès 1995 dans la mise en oeuvre du contrat de Progrès signé fin 1994. Repères.
> 1986. Organisation de l'exploitation en relais de conducteurs
> 1er octobre 1995. Application du contrat de progrès : lecture des disques, paiement de toutes les heures effectuées (mise à disposition, travail, conduite) avec un lissage semestriel.
> 1er janvier 1997. Obtention des allégements de charges sur les bas salaires
> 1er janvier 1998. Mensualisation du calcul et paiement des heures supplémentaires
> 31 décembre 1998. Signature d'un accord sur la réduction du temps de travail avec un salarié mandaté par la CFDT
> Février 1999. Obtention par le ministère du Travail du droit de calcul des heures supplémentaires et des repos compensateurs à la semaine
> 1er mars 1999. Mise en application de la réduction du temps de travail
> Printemps 1999. Embauche de 7 conducteurs pour compenser les repos compensateurs
> Janvier 2000. Ouverture de « l'hôtel de repos conducteurs »
> Janvier 2001. Création d'un poste de responsable des ressources humaines dédié aux conducteurs
Né en 1955 à Saint-Malo, Gilles Collyer obtient un baccalauréat série C en 1974 puis un DUT (Diplôme Universitaire de Technologie) Transport-Logistique à Villetaneuse en 1976. Date à laquelle il passe le permis poids lourd. Il conduit ainsi pendant 6 mois dans l'entreprise de son père, les Routiers Bretons. Ensuite, il prend peu à peu des responsabilités, devenant agent d'exploitation, responsable d'exploitation puis directeur. C'est en 1986 qu'il prend les rênes de la société familiale, en continuant à élargir son champ d'action, vers l'extérieur de l'entreprise. En 1986, il accepte des fonctions d'administrateur au sein de la Fédération Nationale des Transports Routiers (FNTR) d'Ille-et-Vilaine, dont il sera élu président en octobre 1997. Il a également présidé l'Union régionale Bretagne de la FNTR de 1997 à 1999. « J'ai adhéré à la FNTR notamment pour être au courant plus rapidement de ce qui se passe dans le secteur. De plus, je considère que chacun devrait donner un peu de son temps à la profession en général », affirme Gilles Collyer.
C'est pourquoi il s'implique aussi dans le groupement de PME Astre, dont il est membre depuis 1992. Gilles Collyer fait partie de la Commission d'achats depuis 3 ans, du Conseil de Surveillance depuis 1 an et du Comité d'éthique (règlement des litiges entre astriens) depuis 6 mois. « Cette participation active à la vie du groupement m'apporte une ouverture d'esprit et me permet d'échanger des idées. De plus, j'ai l'impression de faire avancer les choses ».
Parallèlement, Gilles Collyer est juge au Tribunal de commerce de Saint-Malo depuis 1992. Il a ainsi pris la succession de son père. En 1998, il devient président d'audience puis vice-président en janvier 2000. « Cela m'apporte de bonnes notions en droit, que je peux ensuite appliquer dans mon entreprise. Par ailleurs, je pense que les confrères sont contents d'avoir un transporteur qui connaisse leurs difficultés face à eux », commente le chef d'entreprise.
A son grand regret, ses activités au Tribunal de commerce s'arrêteront à la fin de l'année, du fait de la réforme en cours pour professionnaliser ces juridictions. Mais, il souhaite par la suite participer au Tribunal des Prud'hommes.