Maurice Bernardet, responsable du DESS Transport et logistique (Lyon II)

Article réservé aux abonnés

Professeur d'économie, longtemps responsable du Laboratoire d'Economie des Transports à Lyon, Maurice Bernadet est l'un des rares universitaires à s'être penché sur le fonctionnement du transport de marchandises en France. A son actif : le lancement de plusieurs études sur le fret urbain et, plus récemment, la conduite et l'animation d'un groupe de travail chargé de rédiger le nouveau contrat type sur la sous-traitance.

Depuis maintenant plus de 35 ans qu'il est dans le monde universitaire, Maurice Bernadet aura marqué l'économie des transports en France. C'est à la fin des années soixante qu'il s'implique dans un milieu qu'il ne quittera plus. De 1969 à 1975, il est alors directeur de l'équipe de recherche en économie des transports de l'U.E.R. de Sciences Economiques. Cette équipe va se rattacher rapidement au CNRS et devenir en 1979 un laboratoire associé, sous le nom de Laboratoire d'Economie des Transports. Maurice Bernadet reviendra le diriger entre 1993 et 1996. Entre temps, il multiplie les casquettes. On le retrouve alors dans toutes les instances qui comptent : au Cedit (Comité d'Evaluation des Informations sur le Transport) et à l'OEST (Observatoire Economique et Statistique des Transports). Mais c'est surtout en tant que membre des groupes de travail sur le contrat de progrès et sur le plan (1993-1996) qu'il s'affirme comme un observateur incontournable. Depuis, même si le contenu de sa carte de visite a changé, il reste un acteur infatigable et insatiable. Plaidant pour la connaissance des modes de livraison urbaine, défendant la promotion du tourisme (il est président de l'observatoire national du tourisme), on retrouve son nom dans tous les conseils d'administration des organismes officiels : CNT, CNR , INRETS, etc. Et entre deux, il a pris le temps de diriger un groupe de travail chargé de mettre au point un contrat type sur la sous-traitance.

PRIX « Les conditions structurelles d'une hausse durable ne sont pas réunies »

L'Officiel des Transporteurs Magazine : Le transport routier de marchandises connaît un redressement économique depuis plusieurs mois, avec notamment une hausse sensible des prix du transport. Pensez-vous que cette évolution sera durable ?

Maurice Bernadet : Il est évident qu'au cours de l'année 2000, une relative pénurie de l'offre a été constatée. Cette pénurie, corrélée avec une forte hausse des coûts de revient, s'est traduite logiquement par une hausse des prix du transport. Maintenant, je suis plus pessimiste à moyen terme. Car cette situation est avant tout d'ordre conjoncturel. Sur le plan structurel, les conditions d'une hausse durable ne sont pas réunies. Il faudrait impérativement que les systèmes de frein à l'entrée à la profession s'avèrent efficaces.

OTM : Le relèvement de la capacité financière devrait logiquement entraîner la disparition de nombreuses entreprises. Etes-vous favorable à cette évolution ?

Maurice Bernadet : La forte réduction du nombre d'entreprises est la seule cause structurelle qui peut entraîner une baisse durable de l'offre et donc garantir un relèvement des prix du transport. Le relèvement de la capacité financière s'intègre dans cette logique. Il faudra cependant attendre plusieurs années avant d'en mesurer les effets et voir dans quel état d'esprit les pouvoirs publics et les organisations professionnelles acceptent l'application de cette mesure.

ENVIRONNEMENT « Le transport routier ne paye pas ses coûts externes »

OTM : Avec la pression des mouvements écologistes et leur montée en puissance au plan électoral, l'argument selon lequel la route ne paye pas ses coûts externes est de plus en plus mis en avant. Pensez-vous qu'il s'agit là d'un levier susceptible de modifier la donne sur les prix du transport routier ?

Maurice Bernadet : La structure des coûts dans le transport routier n'intègre pas complètement les conséquences financières des nuisances environnementales que génère cette activité. Par ailleurs, il est utile de noter que le transport routier n'est pas encore à niveau des autres modes en ce qui concerne les conditions de travail et rémunération des salariés. Il est certain qu'à long terme, le renchérissement des prix du transport trouvera sa source dans la nécessaire internalisation des coûts externes. Il existe aujourd'hui des procédures qui permettent de donner une réalité à ce concept et qui ne reposent pas uniquement sur l'arme fiscale.

OTM : : Pouvez-vous nous donner un exemple ?

Maurice Bernadet : Le Conseil National des Transports vient de publier récemment un rapport sur les permis négociables dans le transport. Avec un permis, une entreprise qui réalise des efforts en matière d'environnement et se situe en dessous des émissions polluantes autorisées, peut céder, moyennant rétribution, des permis à une entreprise qui se situe au dessus des normes d'émissions. Ce système va se mettre en place dans l'industrie. Il est transférable au secteur du transport. Et le rapport du CNT tend à montrer qu'il présente des intérêts et une efficacité certaine.

OTM : Pensez-vous enfin que les résultats des dernières élections municipales vont accroître la pression sur le transport routier, notamment en ce qui concerne les mécanismes des livraisons urbaines ?

Maurice Bernadet : Le dossier concernant les livraisons urbaines est éminemment complexe. De nombreux travaux de recherche ont été entrepris au cours des dernières années, qui ont permis d'accumuler de nombreuses connaissances en la matière. Certains Plans de Déplacement Urbains ont pu utiliser les outils méthodologiques leur permettant de mieux appréhender les flux de marchandises. Mais il faut maintenant passer de la phase recherche à une phase opérationnelle. Et il est encore trop tôt pour savoir quelles sont les mesures les plus efficientes.

INDICES CNR « les méthodes retenues sont satisfaisantes »

OTM : Plusieurs organisations professionnelles plaident pour la publication des indices du Comité National Routier (CNR). Pensez-vous que cette mesure est susceptible de faire évoluer favorablement le niveau des prix ?

Maurice Bernadet : L'universitaire que je suis doit d'abord se réjouir de la remise en ordre des indices CNR. Sur le plan de la qualité scientifique, les nouvelles méthodes de calcul qui ont été retenues sont satisfaisantes et les chiffres publiés traduisent dorénavant une bonne image de la réalité des comptes d'exploitation des entreprises de transport. Quant à la publication des indices CNR, l'initiative est plutôt intéressante. Mais il ne faut pas y voir un caractère légal et obligatoire. Cette publication, si elle a lieu, devra être perçue comme une officialisation du caractère scientifique et objectif des chiffres obtenus.

Actualités : commentaire

Boutique
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15