TAB,un service en vert

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Les Transports Auto Brunier, implantés près de Montpellier où ils sont plus connus sous leur sigle TAB, réalisent un chiffre d'affaires de 150 MF et l'activité connaît une croissance à deux chiffres depuis 10 ans. L'entreprise s'est ainsi hissée au 3e rang des transporteurs de la région Languedoc Roussillon et développe des trafics nationaux, internationaux ainsi que des prestations logistiques. Celles-ci, autant que les flux physiques, demandent une gestion des flux d'informations très affinée. L'entreprise s'est donc dotée de systèmes informatiques performants : EDI et web pour les ordres de transport, traçabilité, transmissions de données en temps réel par GSM, optimisation des tournées, etc. Mais il y avait un chaînon manquant. L'entreprise dispose de 250 véhicules dont le rayon opérationnel est inférieur à 300 km et, pourtant, elle fait exclusivement de « la zone longue ». Elle utilise également plus de 600 caisses mobiles, près de 3 par camion. Car TAB, bien que se définissant comme transporteur routier, s'est spécialisé dans le transport combiné rail/route depuis que la technique existe. On en connaît les avantages, mais aussi les faiblesses : insécurité des chantiers, absence de suivi des trains, de maîtrise des coûts. Aussi, Jean-Claude Brunier a-t-il décidé de s'installer à son compte... Il est devenu, cette année, le premier opérateur privé de transport combiné. La ligne France/Italie baptisée T3M fonctionne depuis octobre. Pour pouvoir disposer d'un système de traçabilité totale, l'entreprise est en train d'équiper ses convois de GPS pour connaître à tout moment le positionnement des caisses. Persuadé que c'est l'entreprise privée et les transporteurs routiers qui feront décoller le ferroutage, Jean-Claude Brunier pourrait envisager, l'an prochain, une ligne privative sur la vallée du Rhône et regarde aussi vers l'Allemagne, le seul pays frontalier où TAB n'est pas encore présent. Un vrai pari sur l'avenir.

«En matière de service, l'offre du transport combiné ne s'est pas développée. Elle se serait plutôt réduite, » estime Jean-Claude Brunier .« En vingt ans il y a eu très peu de nouveaux produits et il n'y a pratiquement pas eu d'innovations ».

Et pourtant, malgré ce constat, le P-dg de Transports Auto Brunier, mise sur l'avenir du trafic rail/route. Un mode que l'entreprise utilise depuis qu'il est apparu sur le marché des transports et dont Jean-Claude Brunier a fait son activité exclusive depuis qu'il a intégré la société familiale, parce qu'il le considère comme un outil logistique performant. « Nous avons toujours cherché à anticiper les mutations du secteur et je pense que l'avenir va nous donner raison », souligne-t-il, pour expliquer la stratégie que TAB développe depuis une vingtaine d'années. Elle est orientée sur trois axes: le multimodal, un transport propre et « intelligent ».

L'obsession du transport propre

« On ne peut plus faire du tout-routier », constate Jean-Claude Brunier, rappelant par ailleurs les contraintes auxquelles le secteur a désormais à faire face: temps de conduite réglementés, réduction de la durée du travail, allongement des attentes, augmentations des coûts de revient, engorgements, interdictions de circuler, etc. « Le transport combiné permet de conserver les avantages de la route, sa qualité de service, la proximité et sa souplesse, tout en lui apportant les atouts du rail: la sécurité,la régularité, les économies d'énergie, le respect de l'environnement... »

Dans ce domaine, TAB a poussé sa logique jusqu'au bout. « L'an dernier, explique Jean-Claude Brunier, avec notre partenaire Les 3 Suisses, nous avons mis en service et à titre expérimental, notre premier tracteur routier fonctionnant au gaz naturel. Il effectue les transports d'approche et les livraisons de notre client depuis le chantier de chargement. Ce véhicule offre un certain nombre d'avantages en terme de pollution, explique-t-il, puisque les valeurs des gaz d'échappement sont en dessous des normes Euro 3 pour les émissions de CO-HC et de Nox. Les fumées dégagées n'ont pas d'opacité ni d'odeurs. Le niveau sonore du moteur est largement inférieur au diesel. C'est en terme de rendement et de consommations que les résultats ne sont pas tout à fait au niveau que nous espérions ». Mais le transporteur souhaite néanmoins poursuivre l'expérience car la technique a progressé et les constructeurs proposent, aujourd'hui, des motorisations mieux adaptées qui peuvent faire du gaz naturel un véritable carburant de substitution. Quoiqu'il ait été étonné que le régime des aides accordées visant à la réduction de la pollution ne le considère pas comme tel...

Associés au transport combiné, ces véhicules permettront à TAB de constituer une chaîne logistique non polluante « qui lui donnera une longueur d'avance » si jamais les réglementations relatives aux activités routières devaient évoluer vers de nouvelles contraintes ...

Le transport « communiquant »

Parallèlement, à l'image d'un nombre grandissant de transporteurs routiers, TAB a développé un système de transport « intelligent ». En amont, pour compléter les moyens de communications classiques avec ses clients (téléphone, fax), il s'est doté d'outils informatiques par le biais desquels il va recevoir les commandes, soit par EDI, soit par le réseau Internet, ce qui va permettre ultérieurement au client de s'insérer dans le réseau de traçabilité qui a été bâti . Car c'est ensuite que l'organisation diffère dans un système de transport dit « communiquant ».

Toutes les commandes des clients sont traitées par un logiciel qui construit une proposition de tournée. Elle est retournée au donneur d'ordre afin d'être validée ou modifiée en fonction de ses besoins. Lorsque la tournée a été optimisée par les deux parties, un plan de chargement est ensuite élaboré prenant en compte l'ordre des livraisons. Les bordereaux qui accompagnent la marchandise sont alors édités et placés dans la caisse mobile où se trouvent les envois par le conducteur qui enlèvera le chargement. Au chantier de réception, le conducteur-livreur exécutera à la lettre les instructions contenues dans le bordereau de livraison qui se trouve dans la caisse mobile, en se référant, par ailleurs, au livret de procédures spécifiques qui lui a été remis par le client auquel l'entreprise l'a affecté. A chaque livraison, au moyen de son terminal embarqué, il informe l'exploitation du transporteur. Connecté à un serveur vocal qui le guide dans le mode opératoire, il transmet les données par GSM au système informatique du siège auquel le client aura parallèlement accès pour connaître précisément la position de ses envois grâce à un code confidentiel.

Plan de secours

Communication informatique avec le donneur d'ordres , optimisation de son portefeuille de commandes, optimisation de ses flux et de ses tournées, suivi des envois, le système est donc parfaitement verrouillé... Sauf que pendant le trajet principal effectué en transport ferroviaire TAB s'est heurté au principal handicap que présente le transport combiné: les aléas du service qu'il a fallu intégrer. « Trois situations se présentent, souligne le responsable des opérations, le train est à l'heure et tout se passe normalement, c'est ce qui se produit dans 80 des cas. Soit il a un léger retard et cela représente 19 % des cas. Jusqu'à 2 heures, nous conservons une marge de manoeuvre et la livraison s'effectuera dans un délai de moins de 24 heures. Soit son retard est supérieur à trois heures et nous reprenons l'ordre de mission afin d'intégrer le retard ».

En réalité, une quatrième solution est envisagée dans le cas où l'opérateur ferroviaire -comme cela se produit, hélas- est confronté à un arrêt d'activité pour cause de grève. « Nous avons un plan de transport de secours », explique Jean Docques, responsable des opérations de distribution, « nous basculons les trafics sur la route. Tous nos conducteurs sont immédiatement avisés et au lieu de se rendre sur les chantiers, ils prennent des itinéraires qui sont préalablement fixés et nous établissons des relais ». En prévision de ces avatars, les véhicules qui effectuent la traction, y compris les porteurs de distribution, sont équipés de cabine-couchette dans le cas où les conducteurs devraient se transformer en chauffeurs grand-routier.

Nouveaux concepts

« Le transport combiné n'a pas évolué depuis 30 ans mais il s'inscrit dans l'avenir », persiste cependant Jean-Claude Brunier. « Il faut tout simplement développer de nouveaux concepts ». Pour cela, une partie des solutions ne peut être apportée que par les réseaux et, lentement, la situation paraît se débloquer, comme le souligne le P-dg de TAB.

« La déréglementation peut nous aider à faire avancer les choses. Le combiné rail/route n'est rentable que sur de longues distances, or il ne sait toujours pas franchir les frontières. L' ouverture ferroviaire qui doit tendre vers une harmonisation des réseaux et des procédures devrait pouvoir assurer une meilleure interopérabilité. En France, la SNCF a fait un premier pas en séparant la gestion des infrastructures de l'exploitation. Par ailleurs, elle semble disposée à investir et à vouloir mettre en place des moyens dédiés au fret, tant en conducteurs qu'en matériel de traction. Mais les chantiers de transport combiné constituent le point faible de la chaîne en raison de leur manque de sécurité, notamment, et nous avons décidé d'en faire le point fort ».

Transport pour le 3e millénaire...

C'est dans cet esprit que TAB a inscrit le projet T3M dans sa stratégie de développement. Un grand pari sur l'avenir. A partir d'un terminal privatif implanté sur le port de Bonneuil sur Marne, dans la région parisienne, TAB achemine quotidiennement deux trains-navettes d'une capacité de 32 caisses mobiles sur Lungavilla, près de Milan (voir page 14). Cette destination a été choisie en priorité parce que l'axe routier transalpin est le plus engorgé depuis la fermeture du tunnel du Mont Blanc, d'autre part, l'Italie était pour TAB la destination internationale la plus importante avec une quarantaine de voyages par jour. Cette première liaison internationale lancée le 25 octobre a démontré la pertinence du choix car, selon Jean-Claude Brunier, son seuil de rentabilité était fixé à 80 % et cette capacité est déjà atteinte. En outre, elle est appelée à répondre très rapidement à l'objectif de traçabilité à 100 % que s'est fixé l'entreprise. En effet, très prochainement, ce train sera équipé d'une balise GPS qui fournira en permanence le positionnement du convoi.

Pour Jean-Claude Brunier, « c'est l'entreprise privée et les transporteurs routiers qui feront décoller le mode combiné ». Il semble convaincu que l'expérience qu'il entreprend avec T3M fera des émules, notamment à l'étranger. Pour sa part, TAB ne devrait pas en rester là. « La voie royale du combiné, c'est la vallée du Rhône », souligne Jean-Claude Brunier. De là à penser qu'une relation entre Bonneuil et le port de Beaucaire, au sud d'Avignon, pourrait voir le jour dans le courant de l'année prochaine, il n'y a qu'un pas... Elle pourrait permettre, éventuellement, à l'entreprise de Saint Jean de Vedas de bénéficier des aides accordées au développement du transport combiné qu'elle n'a pu obtenir lors de l'ouverture de sa ligne internationale. « Les subventions ne concernent apparemment que les liaisons intérieures », note Jean-Claude Brunier. « L'Etat verse actuellement 620 MF pour aider au développement du transport combiné. 8 MF sont rétrocédés aux opérateurs qui gèrent les chantiers », relève-t-il. On peut supposer que la différence sert à combler le coût d'exploitation des lignes combinées par la SNCF.

Mais cela ne devrait pas empêcher TAB de poursuivre le développement de ses activités internationales. Sur les quelque 500 000 tonnes de marchandises que l'entreprise achemine annuellement, 25 à 30 % représente des trafics hors frontière. L'Allemagne où l'entreprise n'est pas encore présente devrait être le prochain objectif dans les deux années qui viennent. C'est dans ce but que TAB s'est choisi, récemment, un nouveau partenaire financier. « Calberson était actionnaire de TAB à hauteur de 35 % du capital mais avait plus ou moins un rôle de sleeping partner », explique Jean-Claude Brunier. « Une opportunité s'est présentée qui nous permettait, en outre, de nous émanciper du groupe ferroviaire. CGEA, filiale du Groupe Vivendi qui opère dans le secteur du transport, est entré dans la capital de la société en reprenant les parts de Calberson par le biais de sa filiale CFTA. Il s'agit d'une société qui exploite des lignes ferroviaires d'intérêt régional, en France, pour le compte de la SNCF. Mais elle a également une expertise en matière de fret. En Allemagne où elle opère sous le nom de DEG, c' est une entreprise ferroviaire qui gère des chantiers de transport combiné ». Une culture ferroviaire et une connaissance des techniques combinées qui font de CFTA un partenaire tout à fait indiqué pour la poursuite de ces projets.

EN CHIFFRES
TAB

Chiffre d'affaires 150 MF

Salariés : 142

Parc de véhicules (moteurs) : 250

Caisses mobiles : 600

Nombre de sites (implantation lourdes en propre) : 6

Dessertes internationales : Italie, Benelux, Espagne, Grande-Bretagne

Marchandises transportées (en tonnes): 500 000

Trafic combiné (caisses/mois) : 3 000

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