Transport national, international et prestations logistiques, tels sont les services proposé par TAB, troisième entreprise du secteur dans la Région Languedoc Roussillon avec un chiffre d'affaires qui devrait atteindre 160 MF cette année. Mais cette entreprise a une particularité: elle ne fait que la zone longue, de préférence au-delà de 500 km, limite inférieure de pertinence du transport combiné. Car, pratiquement depuis que cette technique existe, TAB s'est spécialisé dans le ferroutage et tout son parc est équipé de moyens spécifiques à ce mode de transport. Néanmoins, Jean-Claude Brunier revendique pour son entreprise l'appellation de transporteur routier même si la majorité des transports principaux s'effectue par voie ferroviaire. Cela implique pourtant une organisation différente, comme l'explique Jean Dolques, le responsable des opérations TAB Distribution. « Pour effectuer nos transports, nous disposons d'un parc de 250 véhicules routiers répartis dans nos agences ou rattachés au différents chantiers de transport combiné sur lesquels nous opérons. Ces véhicules effectuent les transports d'approche et les transports terminaux. Ils font la navette entre les entrepôts de nos clients et les points de transbordement à un bout de la chaîne. A l'autre bout, ils rechargent les engins de transport pour les livrer chez le destinataire ».
« Parallèlement, nous disposons d'un parc de près de 600 caisses mobiles, soit 3 par véhicule moteur, ce qui nous permet d'avoir en permanence une caisse en circulation dans chaque sens, la troisième pouvant être déposée soit chez le client, soit chez le destinataire, en attente de chargement ou de déchargement ». Ces caisses mobiles sont de deux types. Aux tracteurs routiers sont affectés des caisses mobiles de 13,60 m d'une capacité de 90 m3, équivalente à des semi-remorques. Elles représentent 60 % du parc. Mais, depuis quelques années, TAB s'est équipé d'un outil plus original et peu répandu chez les transporteurs français: des caisses mobiles de 7,825 m et de 55 m3 de capacité. Elles sont transportées à l'unité par des porteurs ou par paire sur des porteurs remorquants. Elles correspondent à deux types d'activités développées par TAB.
Les caisses mobiles universelles de 13,60 m sont utilisées pour le « general cargo » et peuvent recevoir 33/34 palettes. Elles ont pour vocation d'acheminer les envois de gros chargeurs qui ont des trafics importants en lots complets, en flux tendus, qui ont un seul client pour destinataire. Tandis que les caisses de 55 m3 sont dédiées à la distribution physique porte à porte sans rupture de charge. C'est une prestation qui connaît un fort développement chez TAB et qui représente aujourd'hui 70 MF de chiffre d'affaires.
« Ces caisses béquillables sont laissées chez le client pour le chargement pendant la journée », explique Jean Dolques. « Après avoir pris rendez-vous, l'un de nos chauffeurs ou le véhicule de l'un de nos correspondants vient effectuer l'enlèvement et conduira les caisses jusqu'au chantier de transbordement le plus proche. Elles sont ventilées en fonction des destinations sur des trains dont le départ est généralement fixé à 20 heures. Le transport principal s'effectue en saut de nuit et la caisse pourra être enlevée sur le chantier de destination à partir de 6 heures. Elle sera reprise par nos conducteurs qui sont présents sur tous les chantiers existants. Ceux-ci changeront alors de métier et assureront directement la livraison de 7 à 8 clients répartis sur une tournée qui représente 300 à 350 km. Les véhicules porteurs nous permettent d'avoir une unité de chargement de 8m compatible avec les petits lots et deviennent ainsi des véhicules de distribution. Tous ces véhicules sont équipés de hayon élévateur pour faciliter les manutentions et d'un téléphone portable pour permettre au conducteur d'être en contact permanent avec l'entreprise ».
Ce type de fonctionnement a, tout d'abord, permis à TAB de pénétrer dans les entreprises qui étaient habituées à effectuer des transports pour compte propre. « La formule proposée leur permet en effet, de la même manière, de maîtriser et de contrôler leurs transports de bout en bout », indique Jean Dolques. « Le livreur de TAB qui est dédié à l'entreprise cliente se présente chez le destinataire à ses couleurs et a été formé aux procédures spécifiques relatives aux produits transportés ». Par ailleurs, il connaît parfaitement la région dans laquelle il évolue ce qui est un atout en matière de livraison terminale, pour le choix des itinéraires, notamment.
Le combiné est tout particulièrement adapté aux transports en zone longue et ces prestations s'adressent en priorité aux produits qui ne supportent pas les ruptures de charges ou qui sont difficiles à manipuler. Les marchandises sont transportées sans connaître de passages à quai et ne sont jamais touchées entre le chargement et la livraison finale ce qui constitue un élément de sécurité.
La clientèle de TAB est ainsi constituée principalement de fabricants de produits à haute valeur ajoutée, de matériel électro-ménager, de produits de menuiserie ou de meubles, du secteur agro-alimentaire, de la VPC, des constructeurs automobiles et équipementiers. « En principe, notre activité nous conduit à transporter des produits non pondéreux », explique Christophe Ventura, responsable du site de Saint-Thibéry où sont concentrées les opérations de distribution. « Nous occupons ainsi une position dominante en matière de produits blancs sur tout le sud de la France. Mais, pour des raisons de rechargement, nous sommes amenés à transporter des produits plus lourds, notamment dans le secteur agro-alimentaire ».
Cette technique intéresse également les entreprises qui fabriquent des produits dont les chargements sont très longs puisque le transporteur a la possibilité de laisser une caisse mobile sur place pour qu'elle soit chargée dans la journée et l'enlever le soir. Le coût de cette opération qui est estimé entre 60 et 120 F est sans rapport avec l'immobilisation d'un ensemble routier et de son conducteur. En outre, le système offre une grande souplesse en permettant au transporteur d'épouser toutes les courbes de ventes en fonction des saisonnalités. « Nous pouvons passer de 10 à 30 chargements du jour au lendemain », souligne Jean Docques. « Les capacités du transport ferroviaire permettent de tels écarts, quant à nos véhicules, ils feront autant de navettes que nécessaire entre l'entrepôt et le chantier ».
Enfin, il est particulièrement adapté aux flux tendus. « En la matière, l'utilisation des deux modes est notre principale caractéristique et notre principal atout, poursuit Jean Docques. Une caisse mobile qui sera enlevée à Lille vers 16 heures arrivera à Marseille à 4 heures de lendemain matin. Elle aura parcouru les 1000 km sur un train qui circule à 160 à l'heure et sera livrée en moins de 24 heures ». Une performance que la route seule ne peut offrir et qui est à ranger parmi les avantages que retire l'entreprise.
Parmi ceux-ci: la neutralisation des contraintes de calendrier sans restrictions de circulation.« Alors qu'un véhicule routier qui fait de la zone longue n'effectuera que deux missions dans la semaine, le combiné nous permet d'offrir des départs tous les jours et ce n'est pas un hasard si nous enregistrons le plus fort des commandes en milieu de semaine ». Autre avantage notoire: le transporteur s'est affranchi de la plupart des contraintes sociales tout en « humanisant » la tâche du conducteur. Ils parcourent de courtes distances et rayonnent sur des régions qu'ils connaissent bien, ce qui permet de gagner du temps et de respecter sans problème les temps de conduite, la durée du travail... ainsi que d'évacuer toute incidence que pourrait poser une éventuelle réglementation visant le travail de nuit.
L'ensemble des prestations proposées, du lot complet, à la distribution physique en passant par les flux tendus, constituent une chaîne logistique complète dont la performance est assurée par la traçabilité totale. Pour certains de ses clients, TAB effectue des préparations de commandes. Ce sont les seules marchandises qui sont stockées par l'entreprise et qui passent par les plates-formes de chargement/ déchargement. Seule différence notable par rapport aux prestations que peut proposer un transporteur conventionnel, TAB n'a pas vocation à entreposer les marchandises. A de rares exceptions près. Ainsi, pour l'usine Ricard toute proche, la plate-forme de Saint-Thibéry stocke, par rotation, les 400 tonnes de réglisse qui serviront à la fabrication annuelle de 50 millions de bouteilles. Néanmoins, dans la mesure où les marchandises sont directement chargées dans les caisses mobiles en sortie de production, acheminées en flux tendus avant d'être livrées au destinataire final, on peut considérer que TAB gère des « stocks roulants ».
« Pour pouvoir faire du transport combiné de façon efficace, il faut impérativement que les trafics soient équilibrés dans les deux sens. Si nous envoyons 10 caisses dans le nord de la France, il faut que nous récupérions 10 caisses. Pleines de préférence...De sorte que, avant d'ouvrir une ligne, nous devons prendre nos dispositions pour trouver un autre client à l'autre bout de la chaîne afin d'assurer le retour. C'est particulièrement motivant en terme commercial », note Jean Docques. Et cela a également une incidence sur l'organisation de l'entreprise. Sur un effectif permanent de 142 personnes, elle emploie en effet une trentaine d'exploitants qui sont autant de chargés de clientèle. Ce sont eux qui gèrent les moyens et les flux. Ils conçoivent les programmes de tournées et c'est à eux que réfèrent les conducteurs.
Ceux-ci sont rattachés aux différents centres dont dispose TAB en France et en Europe: Paris, avec Créteil et, maintenant, Bonneuil, Montpellier, Saint Thibéry, Milan (filiale), Barcelone (bureau commercial), Londres (partenariat avec MAT) et Rotterdam. Six sont des implantations lourdes. Parallèlement, d'autres conducteurs sont rattachés à des bases qui sont situées sur la plupart des chantiers existants: Lille, Avignon, Nice, Marseille, Toulouse, Bordeaux et Nantes pour la France, Madrid et Valence en Espagne. Par ailleurs, TAB fait appel à un réseau de correspondants et d'affrétés.
Globalement, l'entreprise achemine 500 000 tonnes de marchandises par an ce qui représente près de 3 000 caisses mobiles remises sur le train chaque mois. La majorité des trafics s'effectue en national mais la part de l'international qui était l'an dernier de 20 %, devrait atteindre 25 % cette année. C'est en effet sur ces trafics que TAB porte maintenant ses efforts comme en témoigne la mise en place de la liaison privative France/Italie sur laquelle l'entreprise achemine près de 500 wagons chaque mois. Les pays du Bénélux sont également des destinations très porteuses ainsi que l'Espagne. « En revanche, explique Jean-Claude Brunier, nous sommes assez déçus par l'évolution des trafics en direction du Royaume Uni. Nous avions fondé de grands espoirs de développement sur la Grande Bretagne avec l'ouverture du tunnel sous la Manche. Or, il apparaît que les britanniques ne sont pas familiarisés avec la technique combinée. Dune part, transférer les trafics sur les voies de surface n'est pas aussi simple, d'autre part, cela nous mettrait en concurrence directe avec les opérateurs routiers dont certains sont particulièrement bien placés sur ces destinations. » Un constat que TAB n'est pas seul à faire..