Peu convaincante, côté transports routiers. C'est le moins que l'on puisse dire de la présidence française de l'Union européenne. A quelques jours de son terme, elle n'enregistre aucune avancée significative, en particulier sur le volet du temps de travail des conducteurs routiers. C'est une première réponse aux questions que nous posions il y a un an, dans la précédente édition de ce numéro Spécial bilan. La crise du gazole a non seulement immobilisé Jean-Claude Gayssot mais elle a aussi remis sur le devant de la scène les carences de l'Union Européenne en matière d'harmonisation fiscale, avec ses conséquences sociales. Au final, ce sont les commissaires européens qui ont pris l'initiative en proposant d'introduire une « attestation de conducteur » dans le dispositif réglementaire, afin de limiter le recours à la main d'oeuvre des pays frontaliers de l'Union. Même constat de lenteur pour les enquêtes diligentées à l'encontre de la Deutsche Post en regard des acquisitions du groupe allemand : aucune conclusion n'a été publiée. En revanche, de nouvelles procédures ont été ouvertes. Parallèlement, les stratégies de Deutsche Post comme de sa consoeur hollandaise TNT Post Group se sont clarifiées en 2000. Offre globale de services européens pour DP et concentration sur l'express et la logistique pour TNT.
Les bouleversements intervenus à l'échelle européenne se sont faits sentir pour le marché français de la messagerie : les petits acteurs locaux ont souffert, disparu ou été rachetés. Et la concentration s'est accélérée, avec la disparition de quelques marques de réputation nationale, comme Dubois, englouti par ABX. La SNCF a enfin réussi à filialiser son service de messagerie, le Sernam, avant d'en amorcer le rapprochement avec Calberson, filiale de Geodis, qui a lui-même tout juste annoncé sa fusion avec le service colis de La Poste. Celle-ci a finalement racheté le spécialiste du monocolis DPD France, dont le concurrent Exapaq n'est plus à vendre.
15 % de hausse. Ces mouvements sont intervenus dans une conjoncture économique favorable, qui aurait permis aux transporteurs routiers français d'obtenir en moyenne 15 % de hausses de tarifs sur l'année, comme le relève Jean-Michel Mousset, Transporteur de l'Année 2000. Ce dernier fonde son estimation sur une augmentation des prix transport de 6 % constatée par le Service Economique et Statistique du ministère des Transports pour le premier semestre. Le marché français du transport routier de marchandises aurait-il atteint la maturité ? Toujours est-il que les entreprises ont ainsi compensé la hausse de charges sociales consécutives à la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail. Une législation nationale quelque peu « assouplie » en 2000 pour les transporteurs sur les normes de temps de travail légales, l'octroi de repos compensateurs et le bénéfice des aides gouvernementales. Pas d'avancée en revanche côté classification des conducteurs : les discussions entre partenaires sociaux sont restées bloquées autour de la prise en compte des temps de chargement/déchargement. Côté patronal, Daniel Chevallier a succédé à Jean-Louis Amato à la présidence de l'Unostra, qui reste isolée, comme la FNTR et TLF. Loin de se rapprocher, les organisations professionnelles ont même accentué leurs divisions en 2000.
Au sein de la FNTR, une scission a donné naissance à l'OTRE (Organisation des Transporteurs Routiers Européens). Côté conducteurs, la pénurie s'est aggravée sur le marché de l'emploi. A l'origine de ce phénomène : l'image de la profession dans l'opinion publique, le recul du chômage, les carences du système de formation et... les salaires. Au 1er juillet, le minimum mensuel garanti pour un conducteur grand routier au coefficient 150 M a été fixé à 10 202 francs brut pour 200 heures de travail. Pour mieux garder ou séduire leur personnel roulant, les transporteurs ont joué plus que jamais la carte du matériel. Leur demande rencontre une offre de poids lourds toujours plus confortables et moins polluants. Parmi les constructeurs, Renault VI en a fait la démonstration cette année en dévoilant une gamme de moteurs conformes aux normes de dépollution Euro 3. Par ailleurs, l'entreprise française semble avoir renoncé au rachat de Nissan Diesel. C'est qu'elle est elle-même tombée sous le contrôle du suédois Volvo Trucks, qui n'a pas pu s'offrir son compatriote et confrère Scania, pour cause de veto européen.
En prenant une part significative du capital de Mitsubishi, DaimlerChrysler a remis sérieusement en cause les accords qui liaient le constructeur japonais à Volvo. Dans sa gamme, Mercedes a essentiellement travaillé sur l'utilitaire léger Sprinter, redessiné et remotorisé au printemps. En même temps, Ford a lancé la commercialisation de son nouveau Transit. Parmi les gammes lourdes, Iveco a attendu l'automne pour lancer la version 13 litres du moteur Cursor, dont la diffusion reste limitée aux véhicules de travaux publics. Et Mercedes a retardé la commercialisation sur ses modèles Atego ou Actros de son six cylindres en ligne d'origine brésilienne, l'OM 906.