Les économies africaines dépendent "de manière beaucoup trop importante" de leurs matières premières, et doivent "s'adapter" pour en tirer une source de croissance et sortir de leur "malédiction", préconise l'organisme spécialisé Cyclope, dans son rapport annuel consacré à l'Afrique.
Les matières premières se "sont plutôt bien comportées en 2016", certaines d'entre elles affichant même, à l'image de nombreux minerais et métaux, un "important rebond" sur les marchés, souligne Philippe Chalmin, coordinateur du rapport annuel Cyclope sur les matières premières mondiales, ainsi que de sa déclinaison africaine Arcadia, rédigée par une trentaine d'experts internationaux sous l'égide du think tank marocain OCP Policy Center.
Philippe Chalmin, également professeur à l'université Dauphine à Paris, a regretté mardi 20 juin que l'Afrique ne sache "pas toujours très bien gérer la rente de ses matières premières". "En Afrique, la malédiction des matières premières se poursuit", a-t-il dit lors d'une présentation de l'ouvrage qui détaille, minerai par minerai ou production agricole par production agricole, l'année 2016, en lien avec le contexte macro-économique et géopolitique du continent.
Remous sociaux au Tchad
Pour Karim El Aynaoui, directeur général de OCP Policy Center, l'Afrique "a besoin de pouvoir titriser ses ressources". "Les Africains sont riches de leur sous-sol, mais ne peuvent emprunter sur cette base, et se retrouvent à exporter des matières premières brutes sans valeur ajoutée", a-t-il regretté. "L'enjeu fondamental pour la plupart des économies africaines est de faire des matières premières une source de croissance, ce qui est un vrai défi", a-t-il ajouté.
S'il ne profite pas assez des bienfaits de ses matières premières, le continent subit en revanche inévitablement et immédiatement les conséquences négatives d'une baisse de prix ou de production. Ainsi en 2016, avec la chute des prix du pétrole, le Tchad "a été obligé d'initier une politique d'austérité qui n'a pas tardé à entraîner des remous sociaux dus en grande partie au non-paiement des salaires des fonctionnaires de certains secteurs et à la réduction des primes dans d'autres secteurs", note Arcadia.
En Côte d'Ivoire et au Ghana, la paix sociale est menacée par la chute des prix du cacao, dont les deux pays sont les principaux producteurs mondiaux. "Sur l'année 2016, le cacao a perdu 22 % de sa valeur sur le marché de Londres et 34 % sur le marché de New York", note Arcadia.
En matière agricole, Jean-Christophe Debar, directeur de la Fondation pour l'agriculture et la ruralité dans le monde (Farm), auteur du chapitre consacré à l'alimentation et aux politiques agricoles, souligne les "progrès" paradoxaux réalisés par l'agriculture sur le continent. "Les gouvernements africains se sont engagés à dépenser au moins 10 % de leurs budgets sur l'agriculture, ce qui est une bonne chose, mais seulement 5 pays sur 54 membres de l'Union africaine, y sont parvenus (hors Maroc)", a-t-il déploré.
L'agriculture peine à décoller
"Force est de constater que l'agriculture africaine n'a pas décollé autant que l'accroissement de la population", a-t-il ajouté, en préconisant une "relance" de la production, de la productivité, ainsi que de la recherche et du développement.
Il a néanmoins mis en garde contre les gros investissements privés internationaux qui se multiplient dans une douzaine de pays d'Afrique sub-saharienne, dont certains ont récemment été dénoncés par des ONG, car ils chassent les paysans de leurs terres sans leur donner de perspectives. "La politique contractuelle que ces investisseurs apportent avec eux est une bonne chose, mais le secteur agricole africain est trop atomisé, et pas assez organisé, pour pouvoir négocier de façon symétrique avec des multinationales", a-t-il dit.
"Les gouvernements africains qui privilégient les grands projets financés par des Chinois ou des Émirats du Golfe veulent donner l'impression qu'ils vont rattraper le retard, mais ils créent un sous-prolétariat agricole" et oublient de mettre en place "de vraies politiques agricoles" destinées à nourrir le continent, a ajouté Philippe Chalmin. Selon Arcadia, en avril 2016, les achats de terres agricoles en Afrique par des investisseurs étrangers (entreprises, fonds de pension, pays…) portaient sur une "superficie cumulée de 10 millions d'hectares, équivalente à 4 % de la surface cultivée".
Philippe Chalmin, également professeur à l'université Dauphine à Paris, a regretté mardi 20 juin que l'Afrique ne sache "pas toujours très bien gérer la rente de ses matières premières". "En Afrique, la malédiction des matières premières se poursuit", a-t-il dit lors d'une présentation de l'ouvrage qui détaille, minerai par minerai ou production agricole par production agricole, l'année 2016, en lien avec le contexte macro-économique et géopolitique du continent.
Remous sociaux au Tchad
Pour Karim El Aynaoui, directeur général de OCP Policy Center, l'Afrique "a besoin de pouvoir titriser ses ressources". "Les Africains sont riches de leur sous-sol, mais ne peuvent emprunter sur cette base, et se retrouvent à exporter des matières premières brutes sans valeur ajoutée", a-t-il regretté. "L'enjeu fondamental pour la plupart des économies africaines est de faire des matières premières une source de croissance, ce qui est un vrai défi", a-t-il ajouté.
S'il ne profite pas assez des bienfaits de ses matières premières, le continent subit en revanche inévitablement et immédiatement les conséquences négatives d'une baisse de prix ou de production. Ainsi en 2016, avec la chute des prix du pétrole, le Tchad "a été obligé d'initier une politique d'austérité qui n'a pas tardé à entraîner des remous sociaux dus en grande partie au non-paiement des salaires des fonctionnaires de certains secteurs et à la réduction des primes dans d'autres secteurs", note Arcadia.
En Côte d'Ivoire et au Ghana, la paix sociale est menacée par la chute des prix du cacao, dont les deux pays sont les principaux producteurs mondiaux. "Sur l'année 2016, le cacao a perdu 22 % de sa valeur sur le marché de Londres et 34 % sur le marché de New York", note Arcadia.
En matière agricole, Jean-Christophe Debar, directeur de la Fondation pour l'agriculture et la ruralité dans le monde (Farm), auteur du chapitre consacré à l'alimentation et aux politiques agricoles, souligne les "progrès" paradoxaux réalisés par l'agriculture sur le continent. "Les gouvernements africains se sont engagés à dépenser au moins 10 % de leurs budgets sur l'agriculture, ce qui est une bonne chose, mais seulement 5 pays sur 54 membres de l'Union africaine, y sont parvenus (hors Maroc)", a-t-il déploré.
L'agriculture peine à décoller
"Force est de constater que l'agriculture africaine n'a pas décollé autant que l'accroissement de la population", a-t-il ajouté, en préconisant une "relance" de la production, de la productivité, ainsi que de la recherche et du développement.
Il a néanmoins mis en garde contre les gros investissements privés internationaux qui se multiplient dans une douzaine de pays d'Afrique sub-saharienne, dont certains ont récemment été dénoncés par des ONG, car ils chassent les paysans de leurs terres sans leur donner de perspectives. "La politique contractuelle que ces investisseurs apportent avec eux est une bonne chose, mais le secteur agricole africain est trop atomisé, et pas assez organisé, pour pouvoir négocier de façon symétrique avec des multinationales", a-t-il dit.
"Les gouvernements africains qui privilégient les grands projets financés par des Chinois ou des Émirats du Golfe veulent donner l'impression qu'ils vont rattraper le retard, mais ils créent un sous-prolétariat agricole" et oublient de mettre en place "de vraies politiques agricoles" destinées à nourrir le continent, a ajouté Philippe Chalmin. Selon Arcadia, en avril 2016, les achats de terres agricoles en Afrique par des investisseurs étrangers (entreprises, fonds de pension, pays…) portaient sur une "superficie cumulée de 10 millions d'hectares, équivalente à 4 % de la surface cultivée".