La Suède ferme le pont de l'Öresund aux migrants sans papiers

Pour la première fois depuis un demi-siècle, la Suède, dépassée par l'afflux de migrants, exigeait lundi 4 janvier une pièce d'identité pour tous les voyageurs entrant sur son sol depuis le Danemark, principale porte d'entrée des réfugiés dans le royaume.
Stockholm impose jusqu'à nouvel ordre aux compagnies de trains et d'autocars qui empruntent le pont-tunnel de l'Öresund reliant la Suède au Danemark d'effectuer des contrôles d'identité avant l'embarquement, côté danois, sous peine d'astreintes de 50.000 couronnes suédoises (5.400 euros) par voyageur. La mesure déplaît fortement au Danemark, qui n'a reçu cette année que 18.000 demandes d'asile et craint que les migrants refoulés par la Suède ne restent sur son territoire. Les contrôles s'effectuent en gare de Kastrup, située à l'intérieur de l'aéroport de Copenhague, d'où partent la grande majorité des réfugiés désireux de se rendre en Suède.
La situation était très calme lundi matin et les passages rapides aux 34 points de contrôle installés sur les quais, malgré l'irritation des personnes qui font la navette quotidiennement entre Copenhague et la troisième ville suédoise, Malmö, pour étudier ou travailler. "Nous avons besoin de contrôles à nos frontières mais ils doivent être fluides", estimait Marten Jegenstam, un consultant danois de 41 ans qui travaille en Suède. Des agents de sécurité privés vérifiaient et photographiaient avec leur smartphone les papiers d'identité des voyageurs avant de les laisser poursuivre ou de les refouler.
Une poignée de voyageurs ont été éconduits depuis l'instauration des contrôles systématiques à minuit, a indiqué un porte-parole de la société danoise de chemins de fer DSB, Tony Bispeskov, sans préciser s'il s'agissait de réfugiés. "Nous leur demandons un titre avec photo, et s'ils n'en ont pas nous leur disons simplement : désolé, nous ne pouvons vous laisser monter", a-t-il expliqué. L'affluence devrait croître au fil de la journée avec le retour chez eux des Suédois travaillant au Danemark.

"Mur de Berlin"

Cette mesure concerne également les ferries empruntant le détroit de l'Öresund. Une clôture de 2 mètres de haut et plusieurs centaines de mètres de long a été érigée en gare de Kastrup pour empêcher les migrants refoulés de se précipiter vers les trains en partance pour la Suède. "C'est comme si on construisait un mur de Berlin", s'est indigné Michael Randropp, porte-parole d'une association d'usagers du pont de l'Öresund, cité dimanche 3 janvier par le quotidien suédois "Dagens Nyheter".
Sanna Vestin, présidente d'une association de défense des migrants, a dénoncé des contrôles qui vont selon elle compliquer encore la vie des réfugiés. "De nombreux jeunes qui fuient leur pays n'ont pas de papier d'identité et n'en ont jamais eu. De nombreux mineurs non accompagnés d'Afghanistan ont grandi en Iran et sont sans papiers", a-t-elle expliqué à l'agence TT.
La Suède avait déjà rétabli le 12 novembre les contrôles à ses frontières, concentrés sur le pont de l'Öresund et les ferries en provenance des ports danois et allemands de la mer Baltique. Mais ils n'étaient réalisés qu'en certains points du trajet et de façon aléatoire. "Je crois que ces contrôles d'identité seront efficaces. Un plus grand nombre de migrants devront demander l'asile dans d'autres pays", assurait le ministre de l'Immigration, Morgan Johansson, lors de l'annonce de ces contrôles le 17 décembre. Ces dispositions, conjuguées à un prochain resserrement des conditions de séjour, ont eu un effet immédiat, le nombre de nouvelles arrivées ayant fortement diminué à partir de mi-novembre de plus de 10.000 par semaine à 3.500 mi-décembre. La Suède, qui compte plus de 20 % de résidents d'origine étrangère, avait jusqu'ici ouvert grand sa porte aux réfugiés. Le royaume scandinave, qui compte 9,8 millions d'habitants, en a reçu plus de 160.000 cette année et en attend 170.000 l'an prochain. Mais l'Office des migrations, qui loge désormais un habitant sur 100 dans le pays, s'est retrouvé dépassé et a demandé au gouvernement d'intervenir. Plus d'un million de migrants ont trouvé refuge en Europe en 2015, de nombreux d'entre eux fuyant la guerre et la misère en Syrie, Afghanistan, Irak ou Érythrée.

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