La logistique titanesque du projet Iter

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Dans les Bouches-du-Rhône, 35 pays sont engagés dans la construction d'une machine qui utilisera la fusion comme source d'énergie à grande échelle, non émettrice de CO2, pour produire de l'électricité

Crédit photo © Daher
Le projet mondial de construction d’un réacteur de fusion thermonucléaire expérimental à Saint-Paul-lez-Durance prend du retard. Les pièces fabriquées par les États associés arrivant progressivement, un deuxième entrepôt est en cours de construction sur Distriport.

Iter, le projet de construction d’un réacteur de fusion thermonucléaire initié en 2006, devait se concrétiser dix ans plus tard, en 2016. Or le réacteur nucléaire visant à reproduire l’énergie du soleil effectuera ses premiers essais en 2015 pour une mise en production… vingt ans plus tard !

"Fin 2035, on commencera à faire de la vraie production d’énergie de fusion et le réacteur fonctionnera à pleine puissance fin 2036 et non 2027 comme précédemment envisagé", admet le directeur du projet Iter, Bernard Bigot, reconnaissant que le calendrier n’était pas réaliste. Ni le budget d’ailleurs, passé de 5 à 18,6 milliards d’euros !

"Mais quelques années de retard par rapport aux projets initiaux ne comptent pas", tempère le directeur.


Un million de pièces à acheminer

L’originalité de ce projet de construction de réacteur expérimental réside dans l’apport en nature de la part des 34 pays issus de 7 régions du monde, impliqués dans l’aventure. Ainsi, chaque pays s’engage à produire des pièces qui, telles un puzzle géant, viendront peu à peu constituer cet ensemble.

Pour organiser l’acheminement d’environ un million de pièces, Iter Organisation avait confié en 2011 à Daher la mission du pilotage des flux depuis le pays d’origine jusqu’à destination. Au terme de ce contrat quinquennal, Daher a transporté seulement 15 % des pièces composant le réacteur.

Prolongation du contrat jusqu’en 2020

Iter a signé début octobre 2016 avec Daher un nouveau contrat de trois ans pour le pilotage des flux logistiques. "Mais les besoins logistiques iront jusqu’en 2025. Ce nouveau contrat couvre l’approvisionnement depuis les États membres jusque sur le site dédouané incluant l’assurance ad valorem", explique François Genevey, directeur de projet Iter chez Daher.

Le groupe intègre l’ensemble des services (transit, douane..). Les expéditions ont été classées en fonction de leurs dimensions. Les envois les plus conséquents, les "colis lourds exceptionnels" (CEL des pièces pouvant peser jusqu’à 60 t, 20 m de haut et 5 m de large) et les Heavy and Exceptionnal Load (HEL) font l’objet d’affrètement de navires spécialisés.

Les autres éléments transitent par conteneurs sur les lignes régulières. "Nous avons transporté à ce jour 25 colis HEL sur un total de 250", détaille François Genevey.

Des stocks pour synchroniser les flux

Iter ayant pris du retard, Daher a du créer des stocks tampons pour synchroniser l’approvisionnement des flux sur le site. Ainsi, il y a dix-huit mois sur le site de Cadarache (42 ha), un premier entrepôt de 9 000 m2 est sorti de terre.

"Ce bâtiment sert à la préparation des "work package", ce sont des unités constituées destinées au thermoréacteur. Cette plate-forme a pour vocation de répondre aux besoins immédiats des équipes sur le site, en aval de la chaîne logistique", précise François Genevey.

15 500 m2 sur Distriport, Iter par la grande porte !

Pour gérer l’amont, Daher a signé le 1er octobre un bail avec Axxa sur Distriport pour deux cellules de 6 000 m2 et 3 500 m2 de stockage en extérieur. Une option a également été prise pour 12 000 m2 supplémentaires soit au total près de 30 000 m2.

Situé à quelques centaines de mètres des terminaux à conteneurs, le bâtiment va faire l’objet de travaux de mises aux "hors normes" Iter, avec, notamment la construction d'une porte de 12 mètres de large pour 9 mètres de haut. Des travaux de consolidation des sols vont également être entrepris avec la pose de micropieux, le site n’étant pas destiné à supporter de telles charges.

"Nous allons aménager un portique monté sur rail permettant de déplacer des charges jusqu’à 30 tonnes de l’extérieur vers l’intérieur de la plate-forme. Il sert à la fois pour la manutention et le stockage des colis hors gabarit non conteneurisés (CEL)", explique le logisticien.

L’entrepôt Distriport équipé de Smart Plan

Par ailleurs le site sera capable de communiquer avec Iter puisqu’il sera équipé de la même architecture informatique avec l’introduction du logiciel Smart Plant et son module "Material Management", voué à assurer une traçabilité sans faille de chaque élément.

Le second module Smart Plant Construction est quant à lui destiné aux ingénieurs chargés d’assembler les pièces. Cinq personnes seulement seront affectées à la gestion de l’entrepôt sur Distriport dans un premier temps.

"L’entrepôt de Fos sera réservé aux pièces dont la durée de stockage est longue. Il y aura donc peu de mouvements", explique François Genevey. Le logisticien compte faire appel à des manutentionnaires hautement qualifiés sachant parler couramment l’anglais.

Charge à ces hommes d’organiser le transfert depuis cet entrepôt vers le site de Cadarache, soit 2 h 30 pour parcourir 140 km. Pour organiser au mieux l’acheminement des pièces sur l’itinéraire, un PC Iter hébergé à la préfecture reproduit l’écran de visualisation de la "control Room", outil de pilotage des flux aménagé dans le bâtiment de la zone des Florides à Marignane. Daher mobilise sur ce projet 20 personnes et fait appel aux services support du groupe.


Iter prend du retard, la rampe aussi

 

Au terme de deux ans d’instruction administrative, la construction d’une rampe pour décharger les colis HEL vient tout juste de démarrer et devraient s’achever au printemps 2017. Devant être positionnée au quai Arcelor, dans une zone classée Natura 2000, l’autorité environnementale a demandé au GPMM, en janvier 2016, un certain nombre de précisions sur l'appréciation des impacts de l'ensemble du programme ITER.

Les travaux, d’un coût de 2,77 M€ prévoient principalement la construction d’un quai, d’une rampe et le dragage et le clapage de 4 850 m3 de sédiments.

Une fois déchargés au quai Arcelor, les colis seront repris sur une barge qui traversera le canal de Caronte pour rejoindre le port de la Pointe. Une fois déchargés, les éléments rejoignent Cadarache par la route. Ces très nombreuses ruptures de charges semblent être le point faible de la chaîne logistique Iter.

Saint-Paul-lez-Durance étant éloigné du port de Fos, Fusion for Energy (F4E), l'organisation qui gère la contribution de l'Europe au projet ITER s’était engagée à assumer le coût du transport depuis Fos jusqu’à Cadarache pour appuyer sa candidature.

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