Le lobbying des pays qui s'opposent à l'application du SMIC aux chauffeurs routiers étrangers circulant en France et en Allemagne a payé. "La Commission européenne a décidé d’entamer des procédures à l'encontre de la France et de l’Allemagne en raison des conséquences qu'entraîne l’application au secteur des transports routiers de leurs législations sur le salaire minimum", indique un communiqué publié le 16 juin.
Les autorités allemandes et françaises disposent de deux mois pour répondre aux arguments avancés par la Commission.
La France mise en demeure
En ce qui concerne la France, "la loi Macron et le décret sur les conducteurs routiers étrangers détachés sur le territoire", qui doit s'appliquer à compter du 1er juillet 2016, sont dans le collimateur. "Après un échange d’informations avec les autorités françaises et une analyse juridique approfondie (...), la Commission a décidé d’adresser une lettre de mise en demeure à la France. Cette lettre constitue la première étape de la procédure d'infraction", précise la Commission.
Le texte français prévoir que le salaire minimum s’applique au cabotage et à l’ensemble des opérations de transport international (sauf le transit). Il établit également l'obligation de disposer d'un représentant sur le territoire français, chargé de conserver les documents relatifs à la période de travail et les bulletins de paie du travailleur détaché à des fins de contrôle, pendant une période de 18 mois après la dernière période de détachement.
Réaction d'Alain Vidalies
Alain Vidalies, secrétaire d'État aux Transports, "prend acte" de cette décision, selon un communiqué diffusé le 16 juin en début d'après-midi. À travers ce dispositif, la France entend uniquement faire respecter l’application du droit communautaire en créant les conditions d’une concurrence loyale, dans le cadre de la libre prestation de services", poursuit le ministre."
"La position de la France est claire : la meilleure façon de faire fonctionner le marché et de respecter la concurrence, c’est d’abord de respecter les règles. Quand il y a tant de détournements des règles, c’est le principe même qui est en cause. Nous voulons donc revenir à l’application du droit européen. J’attends que la Commission joue pleinement son rôle en vérifiant que ce principe est bien respecté par tous les États", avertit enfin Alain Vidalies.
Deuxième salve contre l'Allemagne
L'Allemagne écope quant à elles d'une lettre de mise en demeure complémentaire de la part de la Commission européenne. "Cette décision fait suite à l’ouverture d’une procédure d’infraction en mai 2015 et aux discussions approfondies menées par la suite avec les autorités allemandes en vue de parvenir à une solution à l’amiable. Toutefois, ni la réponse des autorités allemandes à la lettre de mise en demeure ni les discussions ultérieures n'ont dissipé les principales préoccupations de la Commission".
En Allemagne, la loi sur le salaire minimum est entrée en vigueur le 1er janvier 2015. Elles s'appliquait au départ aux chauffeurs routiers en transit, avant d'être restreinte au cabotage et au transport international de et vers l'Allemagne.
Clarifier les règles
La Commission prend soin d'indiquer qu'elle "soutient le principe d’un salaire minimum". Mais elle estime que dans les deux cas étudiés, "l’application du salaire minimum à certaines opérations de transport international n'ayant qu’un lien marginal avec le territoire de l’État membre d’accueil ne saurait être justifiée, en ce qu’elle crée des obstacles administratifs disproportionnés au bon fonctionnement du marché intérieur".
Elle plaide donc pour "des mesures plus proportionnées", rappelant qu'elle a proposé le 8 mars 2016 une révision de la directive 96/71/CE sur le détachement des travailleurs.
"En outre, les prochaines initiatives en faveur du secteur des transports routiers devraient contribuer à une plus grande clarté et à un meilleur respect des règles applicables aux contrats de travail dans le secteur des transports et pourraient résoudre les problèmes spécifiques posés par l’application des dispositions de la directive concernant le détachement de travailleurs dans ce secteur particulier", affirme le communiqué de la Commission.
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