L’écotaxe poids lourds française a essuyé le feu des "bonnets rouges" français, qui ont fini par obtenir sa "suspension". En Belgique, la taxe kilométrique poids lourds est bien entrée en vigueur le 1er avril 2016, mais non sans heurts.
Dès le lancement du dispositif dans les trois régions belges (Bruxelles-Capitale, Flandre, Wallonie), la FEBETRA (Fédération royale belge des transporteurs et des prestataires logistiques) a observé une série de dysfonctionnements.
Ni report, ni réduction tarifaire
Une rencontre a été organisée le jour même entre le cabinet du ministre wallon du Budget, Christophe Lacroix, et une délégation de 4 patrons de petites sociétés de transport qui se présente comme "porte-voix" des manifestants. Ils réclamaient notamment le report d’un mois de l’entrée en vigueur du prélèvement kilométrique, une réduction de 50 % de son montant pour les entreprises de moins de 20 salariés et une accélération des négociations sur d’éventuelles compensations.
Le cabinet a refusé le report au motif que la Région wallonne n’a pas le pouvoir de décider seule d’une telle mesure. Il a rejeté également l’idée d’abaisser le tarif pour les TPE, une mesure jugée discriminatoire, mais a évoqué des facilités de paiement.
Le ministre a par ailleurs demandé à ses contrôleurs de vérifier dans les points de distribution des boîtiers OBU si ces derniers sont bien disponibles. À charge pour Viapass (le gestionnaire du dispositif) de trouver une solution, le cas échéant.
Mise en place de barrages filtrants
Le faible résultat des négociations a fait monter la colère. À l'appel d'un collectif d’indépendants que semblait soutenir également l’Union professionnelle des transporteurs routiers (UPTR), des barrages routiers ont été organisés à partir du 4 avril. Rejoints par des agriculteurs, les opposants bloquent les accès à la Belgique.
La Febetra et sa consœur TLV (Transport en Logistiek Vlaanderen) ont appelé les manifestants à lever leurs barrages filtrants, estimant que ces blocages "ne constituent pas la réponse adéquate" et qu'il faut plutôt continuer "à mettre la pression" sur l'opérateur Satellic et le gestionnaire du dispositif Viapass afin que les problèmes techniques, logistiques et informatiques soient résolus.
Réunion de crise en 30 points
Lors d’une réunion de crise, organisée le 4 avril au soir avec Satellic, Viapass et les représentants des cabinets ministériels des trois régions, trente points ont été mis sur la table, indique Isabelle de Maeght, responsable du service informations de la FEBETRA. "Satellic s’est engagé à remédier à brève échéance à divers dysfonctionnements. Par exemple, afin de pallier la saturation du call center, un formulaire en ligne permet de signaler un OBU défectueux. Déjà disponible en anglais, il est en cours de traduction dans d’autres langues".
Des améliorations techniques sont promises à plus long terme. "Il nous faut un système fiable", résume Isabelle de Maeght, qui, le 6 avril, en appelait à l’intervention des autorités pour lever les barrages qui subsistaient en Wallonie.
La FNTR demande une marche à blanc
Le ton monte aussi côté français. "Face à ce chaos, l’exaspération gagne les professionnels des deux côtés de la frontière", dénonce la FNTR dans un communiqué du 4 avril qui somme les autorités belges "de revenir à la raison et prendre la seule décision qui s’impose : mettre en place, de manière rétroactive, une marche à blanc sur une période d’au minimum un mois permettant un rodage serein de l’ensemble du dispositif et un équipement des véhicules concernés". En outre, elle demande l’annulation des sanctions et facturations pour la période du 1er avril jusqu’à la fin de cette période de test.
Répercussion des surcoûts
À la FNTR Nord, Rose-Marie François fait état de quelques "bugs" d’OBU – notamment des véhicules Euro 6 identifiés comme Euro 3 – mais n’a pas recensé d’amende dressée pour défaut d’unité. "Il est vrai qu’il est très difficile de passer la frontière. Les transporteurs qui chargent habituellement dans des points touchés par les blocages restent, pour le moment, en France. Et les entreprises se sont, pour la plupart, équipées en OBU." Après la mise en œuvre, la deuxième étape interviendra au moment de la facturation ; la troisième se jouera à l’heure de répercuter aux clients un surcoût non négligeable, prévoit Rose-Marie François. "Il faut compter avec un tarif multiplié par 4 voire 5 ou 6, en fonction du trajet et de la norme Euro du véhicule, par rapport aux 8 € de la vignette journalière."
> L'intégralité de cet article sera publiée dans L'Officiel des Transporteurs du 8 avril 2016
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