"Nous nous sommes attaqués à des pratiques anti-concurrentielles initiées par un "senior" management adepte de la vieille école", a déclaré la commissaire européenne à la concurrence, Margrethe Vestager, de passage à Paris le 15 septembre.
Une manière imagée de rappeler que l’amende de 2,93 Md€ infligée aux constructeurs par la DG Concurrence en juillet vient sanctionner une entente tarifaire sur la période 1997/2011.
L'enquête se poursuit pour Scania
Les 4 constructeurs en délicatesse avec le "FBI" bruxellois (Volvo/Renault, Daimler, Iveco et DAF) disposent d’un délai de 3 mois pour régler leurs amendes respectives à compter de la date de notification de la décision (1). La deadline est fixée au 22 octobre.
Marghrete Vestager a rappelé que l’enquête de la DG Concurrence se poursuivait pour Scania dans le cadre de la procédure normale (sans transaction) appliquée en matière d’entente. Toutefois, elle n’a pas été en mesure de dater la fin des investigations.
Appel et recours possibles
"Les constructeurs sanctionnés peuvent faire appel de la décision de la DG Concurrence devant le tribunal de l’Union européenne (2), décrypte Olivier Fréget, avocat spécialiste en droit de la concurrence (cabinet Fréget-Tasso de Panafieu). Si l’on considère que les clients des constructeurs ont été lésés, les transporteurs peuvent aussi aller devant les tribunaux de commerce pour obtenir une indemnisation du préjudice subi. Dans ce cas, les juridictions consulaires pourront déterminer les indemnités sans attendre l’issue des éventuels recours en annulation devant le tribunal de l’UE. Ceux-ci chercheront en effet essentiellement à obtenir une réduction d’amendes mais dès lors qu’un des concurrents a dénoncé les autres, les faits sont acquis et ne seront pas remis en cause."
Pour rappel, MAN a demandé la clémence de la Commission car il a dénoncé les pratiques en apportant des preuves suffisantes pour être exempté d’amende. Toutefois, la clémence ne l’exonère pas d’indemniser les victimes.
L'effet prix, un préjudice
"L’effet prix constitue un préjudice pour tous les acheteurs de camions, quelle que soit la forme de cet achat, insiste Olivier Fréget. Ce sont eux les véritables victimes, plus que les intermédiaires. Des études montrent que les cartels ont pour effet d’augmenter les prix aux consommateurs d’au moins 20 %."
La commissaire à la concurrence a laissé entendre sa voix en matière d’intérêt général européen. "La DG Concurrence a sanctionné un comportement anti-concurrentiel avec de lourdes amendes, a soutenu Margrethe Vestager. Déposer des recours pour obtenir des dommages et intérêts me semble être une bonne chose pour les entreprises concurrentes et les consommateurs."
Trois principaux points d’entente
La décision de la Commission communiquée le 19 juillet porte spécifiquement sur le marché de la production de camions de poids moyen (de 6 à 16 t) et lourd (de plus de 16 t).
Les investigations de la DG Concurrence, lancées en 2011, démontrent que les constructeurs se sont entendus sur trois points :
- la coordination concernant les augmentations des "barèmes de prix bruts" ;
- le calendrier relatif à l’introduction des technologies d’émissions pour la mise en conformité des camions avec les normes européennes de plus en plus strictes (de la norme Euro 3 à Euro 6) ;
- la répercussion sur les clients des coûts de technologie d’émissions nécessaire.
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