Un épisode de plus d’une année s’achève entre la décision et la concrétisation : la conversion du Sajir, porte-conteneurs de 15 000 EVP hérité de la flotte de United Arab Shipping Company (UASC) acquise en mai 2017 par le transporteur allemand. Après une immobilisation de sept mois pour être reconfiguré à la propulsion au GNL, Hapag-Lloyd a remis à l’eau son grand panamax sur le service FE4 Asie-Europe de THE Alliance sous un nouveau nom Brussels Express.
Dès la décision en 2019, l’armateur allemand en a fait un navire pilote en vue de tester la faisabilité technique et d’estimer la viabilité financière d’une conversion à la propulsion GNL. Le cas échéant, la compagnie avait indiqué qu’elle pourrait envisager de reconfigurer seize autres unités de la flotte UASC.
D’abord réticent sur l’option GNL, le transporteur maritime public s’est finalement converti lui aussi au gaz naturel liquéfié, estimant que le carburant était à ce jour l’alternative la plus pertinente à moyen terme. De la parole aux actes, il a passé commande de six navires de 23 500 EVP à DSME en fin d’année dernière.
Cher payé pour un navire construit dès l’origine en « LNG ready »
Cependant, le prix élevé de la conversion - estimé à environ 35 M$ – reste dissuasif pour un porte-conteneurs construit en 2014 par le sud-coréen Hyundai Heavy à Ulsan, et qui avait été présenté comme « prêt pour le GNL » (« LNG ready ») ».
Le coût parait en outre excessif au regard du temps d’immobilisation (même s’il a été prolongé en raison de la pandémie) et de l’espace fret concédé. Il est admis que l’encombrement des cuves au GNL « grignote » entre 250 et 400 EVP selon la taille du navire. En l’occurrence, l’ex-Sajir a perdu 390 EVP de capacité.
La lente mais progressive adhésion au GNL
À ce prix et à ces conditions
Les travaux confiés à Hudong Hondhoa Shipbuilding, la conversion a été exécutée par le chantier naval Huarun Dadong Dockyard à Shanghai. C’est sur ce site que le navire a été doté d'un réservoir GTT Mark III de 6 500 m3 (1 300 t). Il devra donc être ravitaillé deux fois lors d'un voyage Asie-Europe, et une fois lors d'un voyage aller-retour transpacifique. Le moteur MAN qui brûlait du fuel lourd (HFO) a été reconfiguré pour être hybride, avec le fuel à faible teneur en soufre (LSFO) en carburant d’appoint.
Hapag-Lloyd est jusqu'à présent le seul transporteur à avoir opéré un tel ouvrage. À ce prix et à ces conditions, il risque d’y avoir peu de candidats. « Tant que les prix de conversion n'auront pas baissé et que la demande de tonnage n'aura pas suffisamment diminué pour atténuer la douleur d'avoir un grand navire de ligne hors service pendant plusieurs mois, de nouveaux projets de conversion semblent plutôt improbables », tranche Alphaliner.
Le singapourien Eastern Pacific a annoncé récemment son intention de reconfigurer des tankers pour qu'ils puissent fonctionner au méthanol. Une autre opération qui sera scrutée.
Adeline Descamps