Conteneur : le miroir aux alouettes pour certaines compagnies

La liste des compagnies, qui s’étaient positionnées sur les grandes lignes Est-Ouest pour profiter du boom de la demande et aujourd’hui en grande difficulté, s’allongent. Effet ciseau pour ces entreprises qui ont contracté des affrètements à des prix élevés. Alors que la deuxième faillite est enregistrée, la compagnie du discounter Lidl résiste et étoffe encore son offre.

Á son tour, Focus Container Line se retire des grandes lignes Est-Ouest. La compagnie de Brisbane est la dernière en date d’une longue liste de ces compagnies dites opportunistes, sorties de leur pré carré – la desserte du marché domestique ou intrarégional –, pour embrasser une carrière dans le long-courrier. Toutes appâtées par une demande qui paraissait inépuisable, des taux de fret inoxydables et un manque de navires criant.

La normalisation de la conjoncture met aujourd’hui les CULines, BAL, Transfar, Ellerman City Liners, Rifline et consorts face aux difficultés d’opérer avec des navires des 4 500-5 000 EVP sur les lignes intercontinentales où la massification est une loi d’airain pour soutenir les niveaux d’exploitation requis au prix où se facture actuellement le transport. D’autant que toutes ont contracté leurs navires à des tarifs d’affrètement particulièrement élevés.

Après quatre mois de fonctionnement avec un service entre la Chine, l'Australie et la Nouvelle-Zélande, l’Australienne Focus Container Line connaît à son tour la désillusion du marché, placée en liquidation tandis que la Commission australienne des valeurs mobilières et des investissements a confié la gestion de ses actifs à deux administrateurs indépendants. Selon le New Zealand Herald, une centaine de conteneurs chargés sont désormais immobilisés dans le seul port d'Auckland. 

La société exploitait deux navires affrétés, le San Giorgio (1 756 EVP), contrôlé par l'armateur grec Eastern Med Maritime, et le BBC Denmark (1 400 EVP), propriété de Briese Schiffahrt, exploité au sein de la flotte de conventionnels de l’Allemand BBC Chartering. Le premier a été affrété en octobre pour une période de trois à quatre mois à un taux de 23 000 $/j, soit jusqu’à cette fin de mois.

Étoiles filantes

Elles auront eu un parcours d’étoile filante, entrées à la vitesse éclair dans le classement des 30 premiers mondiaux. Face à la réalité du moment, certaines ont réduit la voilure. D'autres se sont retirées des grandes lignes ou ont réorientés leur tonnage vers des trafics plus régionaux où les taux de fret sont encore rémunérateurs. Et une première victime financière a été enregistrée au Royaume-Uni, avec la faillite de Allseas Global Project Logistics, transitaire qui s'était lancé dans le trafic Asie-Europe au milieu de l'année 2021 et doit maintenant à ses créanciers au moins 70 M$.

Á l’ascension fulgurante, CU Lines a été l’un des premiers transporteurs intrarégionaux à se positionner et... à se retirer de la ligne l'Asie et l'Europe du Nord. La compagnie chinoise a annoncé la résiliation anticipée de douze navires panamax appartenant à Antong Holdings.

Tailwind résiste et étoffe son offre

En revanche, un autre de ces mercenaires résiste et continue de se développer. Fondée dans le chaos logistique de la pandémie, la compagnie créée en avril 2022 par le groupe allemand Schwarz, propriétaire du discounter allemand Lidl, ouvre une nouvelle ligne directe entre le Bangladesh et l'Europe, ciblant le non-alimentaire, et notamment les clients de l'industrie du textile et de l'habillement.

Tailwind avait lancé en 2022 son premier service, le Panda Express, entre la Chine et l'Europe, d’abord pour ses propres besoins puis mis à disposition de tiers. Alors que sa première ligne dessert, avec une fréquence de dix semaines et trois navires de 3 850 à 4 950 EVP, les ports de Taicang, Barcelone et Rotterdam via Ningbo et Shenzhen, le Tiger Express assurera des escales à Chittagong (Bangladesh), Limassol (Chypre), Barcelone et Moerdijk (Pays-Bas).

Trois navires de 900 EVP (dont les Faith et Solong, ce dernier actuellement sous contrat avec Containerships) assureront cette liaison de 54 jours, avec des départs du Bangladesh tous les 18 jours, dont le premier est prévu depuis Barcelone le 6 mars. Pour le troisième navire, le transporteur allemand a conclu un accord de coopération avec la société suisse Commodities Supply AG, qui exploite actuellement le Spica J (974 EVP), entre le Bangladesh et l'Europe.

Dans un communiqué, la société, qui considère son TEC comme une alternative au fret aérien, met en avant le transit-time qui « représente un important gain d'efficacité » et les avantages des escales dans les petits ports, comme à Moerdijk, où les marchandises peuvent être chargées sur des camions en un temps relativement court et transportées directement à destination, souligne Wolf Tiedemann, directeur général de Tailwind.

Retour à un schéma logistique normalisé

Bien que la chaîne de supermarchés discount soit allée le plus loin en créant sa propre compagnie, Lidl partie de la cohorte de grands distributeurs – Home DepotWalmart, Target, Cotsco, Coca-ColaAsda, une chaîne de supermarchés britanniques, Dollar Tree, une chaîne américaine de magasins à prix réduits, American Eagle, le détaillant de prêt-à-porter casual –, qui ont affrété des navires pour sécuriser leurs approvisionnements. En septembre, le géant suédois de l’ameublement Ikea, qui avait également affrété des navires pour assurer son sourcing et éviter les ports encombrés, a annoncé un retour à son schéma logistique initial. Beaucoup y ont vu le signe d’un retour à la normalité, ce terme qui aura occupé le champ sémantique durant les deux années frénétiques pour le conteneur.

Adeline Descamps

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