Quasiment en même temps, CMA CGM Air cargo et MSC Air cargo ont mis un terme à leur partenariat avec European Cargo Services (groupe, basé à Roissy, 1,2 Mt de commercialisés en 2023), l'agent général de vente et de service (GSSA) qu’ils avaient en effet en commun.
Pour prendre leur envol à leur lancement en 2021 et 2022, CMA CGM Air Cargo et MSC Air Cargo ont procédé d’une façon assez similaire, en se plaçant sous l'aile expérimentée de partenaires confirmés et en ayant recours à un GSSA pour la commercialisation de leurs capacités de fret.
Le groupe suisse de la famille Aponté a ainsi contracté avec Atlas Air, une filiale du loueur d’avions Atlas Air Worldwide, dans le cadre d'un accord d’affrètement ACMI (Aircraft, Crew, Maintenance and Insurance) à long terme, c’est-à-dire avec la location de l'appareil, de l'équipage, de la maintenance et des assurances.
À son démarrage, en février 2021, le groupe français de Rodolphe Saadé s’est d’abord appuyé sur l’expérience d’Air Belgium, depuis son hub de Liège, mais a très rapidement pris de l’altitude en se procurant un certificat de transporteur aérien (CTA), en disposant de ses propres pilotes (français) et de sa flotte (quatre A330-200F, quatre B777F neufs et quatre A350F une fois les six derniers appareils livrés), basés à Roissy CDG. Ensuite, l’alliance de partage de navires avec Air France-KLM va contrarier ce schéma de départ.
Une gestion GSSA onéreuse ?
Parallèlement, Ils ont tous deux fait appel à un GSSA à ceci près que CMA CGM a en outre signé un accord de réservation d’espaces (blocked space agreement) à bord de ses avions avec Ceva Logistics, de façon à garantir à sa filiale commissionnaire un volume de chargement déterminé sur chaque vol, qu'il soit entièrement occupé ou non.
Dans le fret aérien, le recours à l'agent de vente est classique pour les entreprises qui cherchent à se lancer sur de nouveaux marchés ou à rationaliser les coûts sur un site existant. Mais l’affrètement des opérations de fret peut s’avérer onéreux à l’amorçage, indiquent les professionnels du secteur.
Une gestion en direct
De son côté, MSC Air cargo s'est engagé avec European Cargo Services (ECS) pour assurer la commercialisation sur les marchés nord-américain, européen et mexicain (depuis mai 2023).
Le partenariat a pris fin le 15 février, a annoncé de façon laconique Jannie Davel, vice-président du fret aérien, dans une notification sur LinkedIn. Une décision motivée par la volonté de renforcer la position du jeune transporteur sur le marché du fret aérien, a-t-il signifié. « Nous renforçons nos capacités et équipes commerciales. Nous sommes convaincus que ces changements positionneront MSC Air Cargo comme un acteur clé du secteur, capable de répondre aux dynamiques du marché mondial », a ajouté le dirigeant, suggérant qu'il a les moyens et les ressources d’assurer sa propre exploitation.
Pour rappel, avant de créer sa propre compagnie, le leader mondial avait tenté en vain une mainmise, aux côtés de Lufthansa, sur ITA Airways en 2022 (finalement, le transporteur aérien allemand pourrait bien acquérir 41% d’Ita Airways si Bruxelles donne son feu vert).
Le dernier des quatre nouveaux B777F a été livré le mois dernier à Atlas Air Worldwide pour MSC tandis que le premier avait été réceptionné en novembre 2022 et les deux autres, en juillet et novembre 2023.
Depuis octobre, le leader mondial dans le transport maritime de conteneurs déploie sa toile, ajoutant une liaison entre Milan Malpensa et Tokyo Narita puis en novembre, entre Quito et Liège (deux fois par semaine), ainsi qu'une liaison hebdomadaire entre Saragosse et Mexico.
CMA CGM, fin de l'accord le 1er avril
L'accord entre CMA CGM Air Cargo et ECS prendra, lui, fin le 1er avril. la compagnie commercialisera donc en direct ses soutes. C'est le grand ménage chez le numéro trois mondial du conteneur maritime qui semble aussi vouloir voler de ses propres ailes.
Le groupe a annoncé en janvier dernier mettre un terme à son accord de partage avec Air France-KLM avec effet en mars, deux ans après être entré au capital du transporteur franco-néerlandais (9 %) et quelques mois après avoir formalisé sa joint-venture commerciale (avril 2023).
Aujourd’hui, il est difficile de connaître dans le détail le plan de vol de la compagnie entre les liaisons annoncées, suspendues ou abandonnées. Mais CMA CGM Air Cargo a traversé quelques zones de turbulences, contrainte de fréter quelques-uns de ses appareils à des expressistes, Qatar Airways et DHL express.
Mauvaises années ?
Les compagnies maritimes ont démarré leurs opérations aériennes dans un contexte difficile.
Selon l'Association internationale du transport aérien (Iata), l'activité de fret aérien a diminué de 1,9 % sur un an en 2023, une chute certes plus modérée qu’en 2022 (- 8 %). L’écart avec l’année référence de 2019 est encore de 3,6 %.
« Malgré les difficultés politiques et économiques, 2023 a été marqué par le regain des marchés de fret aérien qui ont récupéré le terrain perdu, après l’extraordinaire pic de Covid de 2021 [+ 18,7 % en tonnes/km transportées par rapport à 2020 - NDLR] », a indiqué Willie Walsh, directeur général de l’Association Internationale du Transport Aérien (IATA), lors de la présentation des résultats le 31 janvier 2024,
Pour le DG, le rebond au dernier trimestre 2023 a été favorisé en partie par les perturbations en mer Rouge qui ont engendré un report temporaire sur le fret aérien en décembre (demande en hausse de 10,8 % par rapport à 2022).
Bonne nouvelle, revigorée par ce mois de décembre prometteur, l’IATA s’attend à une progression de trafic de 4,5 % pour 2024.
Adeline Descamps
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